Dummies in the Mirror : Théâtre en marge
Quelques minutes avant la première de Dummies in the Mirror, vendredi dernier, les comédiens Anna Papadakos et Carlo Alacchi sollicitaient les passants du boulevard Saint-Laurent en s’égosillant dans un porte-voix.
Quelques minutes avant la première de Dummies in the Mirror, vendredi dernier, les comédiens Anna Papadakos et Carlo Alacchi sollicitaient les passants du boulevard Saint-Laurent en s’égosillant dans un porte-voix. «Théâtre gratuit, free theater!» Rares sont les occasions de voir du théâtre de qualité sans débourser quelques (ou même plusieurs) huards. La centaine de spectateurs réunis ce soir-là dans un loft vacant de la Main prouve donc qu’il y a un intérêt pour ce genre d’événement.
Dummies in the Mirror, le plus récent spectacle de la troupe expérimentale et bilingue Dummies Theatre, débute par un long cri paniqué de Carlo Alacchi (un comédien trilingue vu dans la télésérie Omertà ). Puis, il nous entraîne à sa suite dans une vaste pièce bordée d’estrades. Avec Anna, il évoque des souvenirs d’enfance à l’aide de courtes répliques, en anglais, souvent teintées d’humour.
Ceux qui ont vu les deux précédentes pièces de cette trilogie comprendront qu’Anna et Carlo reviennent à la maison après un exil décevant, entrepris dans Go Weast et poursuivi dans Medea in the Media. Par contre, les néophytes auront moins de clefs pour décoder le comportement de ce drôle de ménage.
Toutefois, ce qui impressionne dans cette performance artistique, avant l’histoire ou la qualité du jeu des comédiens, c’est l’intégration réussie de divers médiums artistiques: du cinéma (en 16 mm) et de la vidéo, surtout, mais aussi du chant, de la danse et de la poésie. Cela donne un spectacle hybride et extrêmement visuel, porté par un couple exubérant au jeu très physique. Cette sixième création de Dummies Theatre est en quelque sorte le parent pauvre, très pauvre, de la troupe d’avant-garde new-yorkaise Wooster Group. Du théâtre techno bourré de flashs visuels intéressants, où le texte est utilisé comme un matériau parmi d’autres.
Divers accessoires d’enfants servent à illustrer les souvenirs qu’évoquent Anna et Carlo, comme un pupitre et des poupées défraîchies, don ils font une installation de «recyclage artistique». De ce spectacle énergisant, qui dure un peu plus d’une heure, on retient quelques images fortes, d’efficaces traits d’humour mais, surtout, l’impression d’avoir pris part à une création tout à fait libre dans un lieu étrange. Les artisans de Dummies in the Mirror pratiquent un genre de théâtre très rare et sans compromis, à mille lieues des produits du marketing culturel.
Uniquement pour cela, leur spectacle mérite le déplacement.
Jusqu’au 30 avril
Au 3997, boulevard Saint-Laurent, 20 h 45
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