La Salle no 6 : Méchants malades
Scène

La Salle no 6 : Méchants malades

Avec La Salle No 6, le metteur en scène et fondateur du Théâtre Deuxième Réalité, Alexandre Marine, s’est inspiré d’une nouvelle écrite par Anton Tchekhov en 1892 pour créer une «fantaisie» sur la folie, l’imaginaire, l’identité trouble et «le fossé entre nos désirs et la  réalité».

Après avoir signé quelques spectacles très bien reçus par la critique ces dernières années (Hamlet, Le Marchand de sable), le Théâtre Deuxième Réalité propose actuellement, jusqu’au 4 juin, une sixième production au Théâtre du Maurier du Monument-National. Malheureusement, cette nouvelle création de la compagnie fondée en 1995 risque de moins faire l’unanimité.

Avec La Salle No 6, le metteur en scène et fondateur du Théâtre Deuxième Réalité, Alexandre Marine, s’est inspiré d’une nouvelle écrite par Anton Tchekhov en 1892 pour créer une «fantaisie» sur la folie, l’imaginaire, l’identité trouble et «le fossé entre nos désirs et la réalité». Curieusement, le résultat s’éloigne tellement de l’univers tchékhovien que jamais, durant la représentation, je n’ai pu entendre cette «petite musique» propre à l’oeuvre de l’auteur de La Cerisaie. Marine se serait inspiré de tout autre écrivain que le résultat n’aurait pas été différent.

Car ce spectacle prend la forme d’une pièce expérimentale qui navigue entre divers registres, du grave au comique, pour finir par tomber dans le grotesque. Il met en scène le docteur Raguine, un médecin cynique, féru du philosophe grec Diogène, qui pratique dans un asile d’une petite ville perdue de Russie. Il trouvera un interlocuteur dans la salle no 6 de l’hôpital, là où l’on interne les patients psychiatriques. Le docteur Raguine défendra la thèse que le bonheur se trouve en soi; la souffrance, étant extérieure à soi, peut être ignorer. L’histoire est exposée dans deux réalités – celle du monde normal et celle de l’imaginaire – par le dédoublement de chaque personnage.

Si les adaptations d’Alexandre Marine sont généralement pertinentes, avec La Salle no 6, le metteur en scène s’est drôlement éparpillé. Sa proposition manque de clarté et de concision. Il faut dire qu’il est difficile de bien rendre la folie au théâtre; ici, toutes les scènes à l’asile semblent artificielles.

Qui plus est, la distribution, très inégale, n’aide pas à rendre plus limpide la proposition de Marine. On trouve trop de niveaux de langage (on passe du tu au vous dans la même réplique, et certains interprètes maîtrisent moins bien que d’autres leur diction). Sur scène, il y a autant de styles et d’écoles de jeu que d’interprètes. Karyne Lemieux joue tellement gros qu’on croirait qu’elle confond la scène d’un théâtre avec le plateau d’une télésérie. Patrice Gagnon est tendu et beaucoup trop fébrile dans les deux rôles qu’il défend. Patrice Savard fait preuve d’autorité dans les rôles du docteur Raguine et de Diogène. Mais, paradoxalement, son caractère intense se marie mal avec l’humour de la pièce. Seul Vitali Marakov se tire bien d’affaire avec un jeu détaché et parfaitement maîtrisé qui souligne le caractère ironique du texte. Hélas, c’est trop peu pour faire oublier les longueurs du spectacle.

Jusqu’au 4 juin
Au Théâtre du Maurier du Monument-National
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