Gumboots : Les chats bottés
Le Festival Juste pour rire accueille GUMBOOTS, une troupe d’Afrique du Sud qui fait revivre une danse rythmique née dans les mines d’or de l’apartheid. Armés de bottes decaoutchouc, les mineurs noirs y faisaient un pied de nez à l’esclavage. Du pays de Nelson Mendela, le metteur en scène Zenzi Mbuli nous parle de cette danse qui rend hommage aux esclaves africains. Frappant.
Durant le Festival Juste pour rire, si vous remarquez des individus chaussés de grosses bottes de caoutchouc par une journée ensoleillée, ne vous méprenez pas. Non, ils ne sont pas pompiers. Non, ils ne réparent pas les égouts de la ville. Qui sont-ils alors? Eh bien, ni plus ni moins que des danseurs sortis tout droit d’Afrique du Sud!
Dans le cadre de la série Les Incontournables Juste pour rire (qui nous a fait découvrir dans le passé Slava et Arturo Brachetti), une troupe de danse de l’Afrique du Sud, Gumboots, sera au Centre Pierre-Péladeau pour sa première prestation en Amérique du Nord, après un succès monstre à Londres et avant une série de représentations sur Broadway. Sur scène, six danseurs professionnels, trois chanteurs et trois musiciens font revivre une danse
traditionnelle issue de l’ancien régime de l’apartheid. "C’est une danse rythmique grâce aux bottes de caoutchouc qui frappent le sol, explique le metteur en scène Zenzi Mbuli, joint en Afrique du Sud avant le départ de la troupe. Elle est tirée du passé trouble des esclaves
noirs, et leur rend d’ailleurs hommage."
Et pour cause. Au XIXe siècle, la ségrégation raciale fait rage en Afrique du Sud. Au fond de sombres mines d’or, les esclaves noirs connaissent des conditions de travail exécrables. "La chaleur les étouffait, raconte Mbuli. De plus, il leur était interdit de parler." Plongés dans l’eau, les pieds des esclaves s’infectent peu à peu. Les morts s’accumulent et la production
ralentit. Que faire? Installer un système de drainage? Trop coûteux, rétorquent les entrepreneurs blancs. "Alors, note Mbuli, ils ont décidé de distribuer des paires de bottes en caoutchouc Wellington", des "gumboots". Grâce à ce nouvel équipement, les esclaves, autrefois tenus au mutisme, peuvent désormais communiquer entre eux. Tap… tap-tap-tap… tap. Ils font claquer leurs bottes sur le sol et s’inventent ainsi un code morse nouveau
genre. Puis, du rudimentaire moyen de communication émerge une chorégraphie. Un art traditionnel est né. "La particularité de cette danse de groupe réside d’ailleurs dans la révolte et la soif de liberté qu’elle exprime, indique Mbuli. C’est une réaction à l’esclavage."
Dans les années soixante-dix, soucieux de préserver les vestiges du passé, un centre communautaire de Soweto ressuscite cette danse folklorique avec un groupe de jeunes. Certains d’entre eux font aujourd’hui partie de la troupe gumboots. "Nous avons voulu lui donner un second souffle, souligne Mbuli. En Afrique du Sud, c’est maintenant une véritable folie. Les jeunes sortent danser dans la rue et organisent même des compétitions de gumboots." Au rythme de percussions, de guitares et de chants a cappella, les danseurs
de Gumboots s’alignent et font des gestes énergiques et vigoureux imitant des travailleurs en action (ou en pause café!). Leurs chorégraphies s’articulent devant un décor rappelant les mines – chariots sur rails et roues géantes, entre autres. "Cette danse se situe entre la gigue de groupe et des exercices de conditionnement physique", précise Mbuli. La troupe revêt aussi des costumes minimalistes à l’image des esclaves: pantalons bouffants, bandeaux et, bien sûr, bottes de caoutchouc. Souvent comparée à des troupes de danse comme Stomp et Tap Dogs, Gumboots se distingue pourtant du lot. "C’est un spectacle très
festif, malgré tout ce que cette danse évoque. C’est une expression de joie!"
Du 9 au 30 juillet
À la salle Pierre-Mercure du Centre Pierre-Péladeau
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