Pierre Palmade : Candeur d'enfant
Scène

Pierre Palmade : Candeur d’enfant

À l’autre bout du fil, la voix est surexcitée. C’est bien simple: l’humoriste français Pierre Palmade s’avoue "fou de joie" à l’idée de venir à Montréal présenter un spectacle entier, dans la nouvelle série Les Têtes d’affiche du Festival Juste pour rire.

À l’autre bout du fil, la voix est surexcitée. C’est bien simple: l’humoriste français Pierre Palmade s’avoue "fou de joie" à l’idée de venir à Montréal présenter un spectacle entier, dans la nouvelle série Les Têtes d’affiche du Festival Juste pour rire. "Ça fait cinq ans que je voulais revenir, mais pas juste pour faire un sketch dans un gros gala, où il est difficile de se singulariser. Je garde un si bon souvenir de mon spectacle solo, il y a cinq ans. J’avais vraiment pris mon pied, parce que je m’étais rendu compte que je faisais un humour affectif qui passait facilement la barrière de l’Atlantique. Enfin, je peux revenir. Je suis comme un môme, là!"
C’est d’ailleurs à la Maison Théâtre que se produira Pierre Palmade pour dix représentations, avec un spectacle ironiquement baptisé Premiers adieux, qui combine "le meilleur" de son sixième et tout récent one-man-show, écrit par d’autres, et les pièces d’anthologie de sa carrière, signées de sa main. "Je vais donner un meilleur interprète à certains anciens sketchs qui n’avaient peut-être pas eu leur chance, parce que j’étais très jeune quand je les ai joués, explique le volubile artiste. Avant, c’était surtout l’auteur qu’on venait voir raconter des textes. Maintenant, je crois que le comédien a rattrapé l’auteur."
Palmade n’a pas encore arrêté le choix définitif des numéros. "Les deux grands axes qui m’intéressent maintenant, c’est soit de reproduire exactement la réalité, et notamment les relations humaines – couple, famille et amitié -, ou de partir carrément dans des choses un peu absurdes: je me demande ce qui se passe quand on ne tond pas un mouton, ou s’il vaut mieux avoir des dents en bois ou une jambe en mousse… Finalement, ce ne sont pas les choses drôles de la vie qui m’inspirent. Ça ne m’intéresse pas de raconter des blagues. Par contre, une scène de ménage, un adultère, des rapports familiaux tordus, c’est pas drôle à vivre, mais montrés sur scène, ça devient un exutoire."
Son défi consiste ainsi à rendre l’ordinaire spectaculaire. "Les gens disent: "Comment t’as eu cette idée?" Mais finalement, c’est juste que, moi, j’ai pas trouvé ça normal. Si j’ai un talent, c’est de ne pas trouver normal ce que beaucoup de gens considèrent comme naturel. C’est une espèce de petite maladie. Je ne trouve pas ça normal de s’aimer, de s’engueuler, de vivre ensemble… Je ne trouve rien de normal."
S’il constate qu’avec le temps, certaines de ses colères, initiatrices de numéros, se sont émoussées, d’autres ont la vie dure. "Tout ce qui concerne les excès de testostérone des hommes par rapport aux femmes, le machisme, c’est resté. La mauvaise foi masculine m’interpelle beaucoup", rigole celui qui a beaucoup écrit avec et pour des drôles de dames, surtout Muriel Robin.
D’où une intention un peu assassine dans le trait, parfois. "Si j’interprète un con ou un intolérant, j’ai l’impression que je le tue en même temps; que, puisque je me moque de lui, il n’osera plus jamais être comme ça. Je me rends compte le lendemain que j’ai tort, étant donné qu’il existe encore. Généralement, ce sont les derniers à se reconnaître, en plus. C’est peut-être une lutte vaine, dans la mesure où je ne monte pas sur scène pour militer non plus. Mais il y a un peu ça comme élan, quand même. C’est très naïf, mais en attendant, ça fait rire."
Et Pierre Palmade fait rire d’abord pour rassurer, et non pas pour déranger. "J’ai trop envie de plaire, confie-t-il. C’est le seul moment où je suis sûr qu’on m’aime vraiment. Dans la vie, comme je ne suis pas Alain Delon, que je ne suis pas très sûr de moi, un peu timide, faire rire, c’est ma façon la plus sécurisante de plaire. Après, c’est de dénoncer de petits travers. Mais c’est tout sauf Coluche. C’est ce qui m’avait d’ailleurs aidé à me singulariser quand j’ai débuté, il y a dix ans. À l’époque, en France, on cherchait le nouveau Coluche, les nouveaux Desproges ou Le Luron, des gens féroces. Moi, j’arrivais avec une certaine candeur, et on m’a très vite démarqué."
Depuis, celui qui est "monté" à Paris à l’âge de 19 ans a enfilé les shows, seul ou en couple, a écrit pour les autres, dialogué quelques films, dont Pédale douce, de Gabriel Aghion (avec qui il oeuvre à l’adaptation de la série-culte britannique Absolutely Fabulous). Un parcours bien rempli pour un artiste d’à peine 32 ans… "Je suis obsédé par mon métier, admet-il. Je ne fais que ça! Mon argent, je le passe dans les salaires de gens qui s’occupent de tout mon quotidien, parce que moi, je veux écrire, jouer, rigoler avec mes amis, éventuellement faire l’amour, et basta! Rien d’autre. J’ai envie de préserver une certaine immaturité. Bizarrement, dans la vie, l’immaturité permet d’être un peu plus mûr philosophiquement, parce qu’on a du temps pour des réflexions de luxe."
"C’est formidable, s’étonne-t-il en s’esclaffant: quand on fait ce métier, il y a des gens qui vous demandent quels sont vos loisirs…"

Dès le 11 juillet
À la Maison Théâtre
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