Tsé-Tsé / Les Héros de mon enfance : Contes urbains
Scène

Tsé-Tsé / Les Héros de mon enfance : Contes urbains

Deux jeunes troupes se lancent avec enthousiasme dans l’aventure du «théâtre d’été urbain» autogéré. Quand l’imagination peut être autant festive que créatrice.

À l’instar du chercheur de son film fétiche, Olivier Choinière a un faible pour les expériences audacieuses. Hommage caustique à un film horrifiant (La Mouche), Tsé-Tsé, pose les jalons d’un genre nouveau, le «théâtre d’été urbain de série B». Un genre kitsch et ultraléger, dans lequel papa n’a pas, mais alors vraiment pas, toujours raison…

La courte création – à peine une heure quinze – est présentée sur une scène à ciel ouvert, aménagée sur le toit du Théâtre d’Aujourd’hui. On s’y retrouve dans un bungalow sans murs où évolue la famille d’André Delorme, un chercheur montréalais qui hérite d’une tête et d’une patte de mouche à la suite d’une expérience foireuse. En fait d’expérience, l’idée de jouer dehors en est aussi une de taille, avec son lot d’impondérables: le soir où j’assistais au spectacle, les comédiens ont terminé la représentation sous une pluie glaciale…

Des trois comédiens, Simone Chevalot se démarque par une prestation particulièrement inspirée de reine du foyer charmante et dévouée. Avec ses yeux écarquillés, sa démarche gracieuse et sa bonne humeur à toute épreuve, elle incarne à merveille la parfaite ménagère des années 50. Son mari, le scientifique (Marc Beaupré), a moins d’éclat, bien que sa tête de mouche bricolée produise son effet; tandis que Michel Lavoie campe un fiston grassouillet qui suscite le rire, aussi bien par son look que par ses répliques absurdes d’enfant un peu fêlé.

Et de l’absurdité, il y en a beaucoup dans l’univers incongru mis en scène par Choinière. Pendant que maman disparaît dans un divan, son bambin discute avec un chat invisible, le bien nommé Duplessis; et papa, pour se faire pardonner d’avoir désintégré le minet en question, offre à son rejeton une cage remplie… de bébés phoques.

Bien que bourrée de flashs amusants, Tsé-Tsé s’essouffle à mi-parcours, une fois, en fait, passé le dévoilement de la monstrueuse tête d’insecte du savant. Par-delà les effets spéciaux et les gags, Choinière aurait ggné à pousser plus loin la réflexion qu’il amorce sur les progrès de la science – «N’est-ce pas jouer à être Dieu?», demande Hélène à son mari – et l’importance du regard des autres. À quand un remake plus étoffé?

Les Héros de mon enfance
En reprenant ce «classique» du répertoire québécois, le metteur en scène Pascal Yann Deschesnes et son équipe se lancent à leur tour, avec enthousiasme, dans l’aventure du «théâtre d’été urbain» autogéré. Vendredi soir dernier, les neuf comédiens se sont démenés pendant plus de deux heures devant à peine dix spectateurs!

Rappelons que Michel Tremblay s’en est donné à coeur joie dans cette comédie musicale pour adultes, écrite dans un français «international», bourrée de grivoiseries: exit les adorables et abêtissants héros qui ont bercé notre enfance, le Prince charmant sort du placard, le Chaperon rouge dépucelle le Petit Poucet et la Belle au bois dormant est nymphomane… C’est l’anarchie dans le merveilleux monde des contes de fées!

Du lot, le déluré Chaperon rouge de Lili Gagnon se démarque par sa vivacité. En grande folle hystérique, le Prince charmant de Marc-André Leclair offre aussi de beaux moments, mais c’est la fée Carabosse de Pascal Yann Deschesnes qui remporte la palme du personnage le plus dépravé. De plus, cette «méchante» au look de Ru Paul chante avec justesse et émotion, ce qui n’est malheureusement pas le cas de tous les comédiens.

Faut-il s’en réjouir? Près de vingt-cinq après sa création originale, Les Héros de mon enfance demeure une pièce impertinente, voire audacieuse. Une pièce où, chose trop rare durant la saison estivale, le sexe n’est pas qu’un prétexte à quiproquos entre maris et femmes…

Tsé-Tsé
jusqu’au 25 août
Au Théâtre d’Aujourd’hui

Les Héros de mon enfance
jusqu’au 2 septembre
Au Zest