Marianne Vague : L’éveil des sens
En écrivant une pièce qui met en scène les tribulations d’un triangle amoureux, Pascal Brullemans a fait un pari risqué: celui de créer du neuf avec un sujet vieux comme le monde. Si Marianne Vague est une "variation sur un même t’aime" usé, il s’agit tout de même d’une oeuvre théâtrale audacieuse, bourrée de flashs rigolos et portée par des comédiens allumés.
En écrivant une pièce qui met en scène les tribulations d’un triangle amoureux, Pascal Brullemans a fait un pari risqué: celui de créer du neuf avec un sujet vieux comme le monde. Si Marianne Vague est une "variation sur un même t’aime" usé, il s’agit tout de même d’une oeuvre théâtrale audacieuse, bourrée de flashs rigolos et portée par des comédiens allumés.
Un homme, deux femmes. À partir de cette prémisse banale, Brullemans a imaginé une histoire étonnante, où les stéréotypes amoureux en prennent pour leur rhume. Ici, c’est une femme (l’envoûtante Marianne, interprétée par Johanne Lebrun) qui mène le jeu et brise les coeurs. Elle séduit d’abord la timide Ingrid (Anne-Sylvie Gosselin), qui abandonne pour elle ses études en médecine, puis Ricardo (Danny Gagné), qui gagne sa croûte comme "pute d’aéroport". Ils habiteront sous le même toit, le temps de devenir tous trois amants, avant que la capricieuse Marianne ne mette les voiles, menant Ricardo dans son sillage. Elle aura un enfant de lui, Mélusine, qu’elle s’empressera de confier à la dévouée Ingrid, avant de reprendre le large.
Ce qui fait la force de Marianne Vague, ce n’est pas tant son propos, léger comme une bulle, que la façon dont l’histoire nous est racontée. Comme l’explique le metteur en scène Éric Jean dans le programme, le spectacle possède une forme narrative particulière: "Il fonctionne comme le cerveau humain; il suffit qu’un personnage pense à un autre pour qu’il apparaisse, à un lieu pour que l’on s’y retrouve, à une émotion pour qu’elle soit ressentie." Ces va-et-vient dans le temps donnent à la pièce un rythme qui rappelle celui des rêves.
La mise en scène d’Éric Jean nous plonge donc dans un univers onirique que reconnaîtront ceux qui ont vu Ushuaïa et Une livre de chair. Encore une fois, des objets jaillissent des meubles et des personnages apparaissent comme par magie. Fasciné par les âmes qui errent entre le rêve et la réalité, le diplômé de l’UQAM démontre ici qu’il possède un style bien à lui, fortement teinté de références cinématographiques. Les comédiens qu’il dirige offrent des prestations inégales: Anne-Sylvie Gosselin impressionne, tandis que Johanne Lebrun et Danny Gagné forcent parfois la note, et qu’Anik Beaudoin (la petite Mélusine) et Hélène Boissinot (Teresa, un genre de thérapeute) servent de faire-valoir aux autres. Heureusement, ces deux dernières ont leur instrument, un violon et un violoncelle, pour s’exprimer…
Si la belle Marianne est une aguicheuse, le spectacle tout entier semble chercher à éveiller les sens: rarement a-t-on vu deux femmes s’embrasser sur une scène avec la fougue dont font preuve Ingrid et Marianne, ou encore, deux (et même trois) comédiens mimer l’acte sexuel avec autant d’entrain! Dans cette création empreinte de rêverie, on échange autant, sinon plus, de caresses que de répliques…
Jusqu’au 30 septembre
Au Théâtre du Maurier du Monument-National
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