Martin Matte : À vos marques
Scène

Martin Matte : À vos marques

La rentrée humoristique automnale fleure la testostérone. Plus que jamais, c’est à travers la lorgnette d’une vision de "gars" qu’on y voit le monde.

La rentrée humoristique automnale fleure la testostérone. Plus que jamais, c’est à travers la lorgnette d’une vision de "gars" qu’on y aperçoit le monde. Dans cette moisson dominée par le fracassant "à soir, on s’assume" de Patrick Huard, le premier one man show de Martin Matte n’est pourtant pas passé inaperçu. Raillant l’homme peint dans ses atours les moins glorieux, le jeune monologuiste impose d’ores et déjà un talent certain.

Ce n’est pas moi qui le dis, c’est lui, dans un savoureux numéro d’ouverture qui s’avère l’un des temps forts du spectacle mis en scène par Christian Bégin et François Avard (ce dernier collaborant itou aux textes). Annoncé par des photos à saveur mégalomane où on le voit aux côtés des grands de ce monde, Martin Matte désamorce brillamment l’angoisse de sa rentrée au Saint-Denis. "Pourquoi moi, si bon?" s’interroge suavement un humoriste ébloui par son propre talent, qui a peine à trouver son égal. Oui, bien sûr, Yvon Deschamps, "c’était cute pour son temps"… Une entrée en matière culottée et parfaitement réussie, en cours de laquelle Matte met le public dans sa poche.

Si l’arrogance de l’humoriste est parodique, son assurance, elle, n’est pas feinte. Mimiques imparables à l’appui, le p’tit nouveau habite la scène avec une présence, un naturel et un aplomb étonnants. Et son matériel? Pas très recherché, mais généralement solide. Bon gars straight comme il en pleut sur la planète humour, Martin Matte parle notamment de chars, de détails triviaux des relations de couple, ne dédaigne pas une allusion scato (la blague fait son effet, il faut l’avouer). Mais il dégommerait plutôt l’image du mâle fort. Ses monologues teintés d’autodérision dessinent le portrait d’un froussard qui hésite à affronter son paternel dont il vient de scrapper la jeep, qui emprunte tous les détours possibles pour ne pas défendre une blonde trop téméraire contre les armoires à glace qu’elle a provoquées (un numéro par ailleurs longuet)…

La grande qualité du spectacle de Matte tient sans doute à ses accents de vérité. Outre un texte plus social sur le burn out, où il débine le "workaholisme"!, sous le couvert de faire l’apologie de l’ambition (on reconnaît la patte de Deschamps dans cette façon de proférer des énormités, de prendre le contrepied de ses valeurs pour faire réagir), l’humoriste s’inspire surtout du quotidien. Se met lui-même en scène, ainsi que ses proches: son père, incapable d’exprimer ses émotions – typique! -; son frère, marginalisé par la perte de sa mémoire immédiate dans un accident. Un monologue prenant qui glisse vers un finale plus émotif.
Martin Matte? Un "gars ben ordinaire" quant à ses préoccupations, mais qui a le talent d’en rendre à la fois la saveur familière et le caractère risible sur scène.

En supplémentaires du 14 au 18 novembre
Au Théâtre Saint-Denis 2
Voir calendrier Humour