Tapage nocturne : Beaucoup de bruit
Scène

Tapage nocturne : Beaucoup de bruit

Confronté à la mort d’un être cher, qui ne souhaiterait avoir une dernière conversation avec lui, histoire de parler enfin des "vraies affaires", de celles que l’on a, toute sa vie durant, eu peur d’aborder?

Confronté à la mort d’un être cher, qui ne souhaiterait avoir une dernière conversation avec lui, histoire de parler enfin des "vraies affaires", de celles que l’on a, toute sa vie durant, eu peur d’aborder? C’est la chance qu’aura un jeune homme (Diego Thornton) entré par effraction dans un salon funéraire pour poser quelques ultimes questions au père manquant, qui en a fait un fils manqué… Tapage nocturne, de Francis Monmart, porte bien son nom: le macchabée et son rejeton s’affronteront sans retenue, dans un bruit et une fureur exacerbés par une mise en scène sans nuances.

Le duo réuni par le metteur en scène Claude Lemieux était pourtant prometteur: Diego Thornton et Luc Morissette (qui a interprété Van Gogh dans le salué L’Ange et le Corbeau, de Monmart) ont un indéniable talent. Mais, en trentenaire qui freake à l’idée de devenir père à son tour, Diego Thornton en fait trop. Excité comme une puce, il bondit partout et multiplie les tics nerveux. En paternel "fendant" et carriériste, son partenaire de jeu s’en sort mieux, bien que certaines répliques soient trop ampoulées pour être crédibles. De son côté, Jorge Fajardo fait ce qu’il peut dans un rôle inabouti de gardien de nuit, dont on retiendra surtout la démarche traînante, rythmée par le tintement d’un gigantesque trousseau de clés.

Cette vigie taciturne serait-elle saint Pierre, gardien du paradis? Durant Tapage nocturne, on ne sait jamais quelle est la part de rêve et celle de réalité. Le fils fantasme-t-il la déchirante confession posthume de son géniteur? On est dans un théâtre qui oscille entre réalisme et fantastique, quelque part entre le vrai et le faux. L’étrangeté de cette proposition théâtrale est accentuée par l’utilisation de chandelles et de lampes de poche. Le recours à de nombreux accessoires (le père passe quasiment autant de temps à fumer des clopes qu’à se confier) nuit au rythme de cette tragicomédie que l’auteur, décédé l’an dernier, avait dédiée à son père.

Bien qu’imparfaite, cette création a le mérite de poser des questions essentielles sur la vie, et d’offrir d’éclairantes réflexions sur la condition masculine et l’immaturité de certains pères, qui ont gardé le coeur adolescent. Finalement, ce texte tout en délicatesse aurait très certainement gagné à être joué de manière moins tapageuse…

Jusqu’au 11 novembre
Au Théâtre Prospero