Scène

Le Malade imaginaire : Le malade et le cabotin

Théâtre Denise-Pelletier du pauvre, dont il partage depuis cinq ans la mission de préparer les spectateurs de demain, le Théâtre Longue Vue ne ménage rien pour plaire à son public  étudiant.

Théâtre Denise-Pelletier du pauvre, dont il partage depuis cinq ans la mission de préparer les spectateurs de demain, le Théâtre Longue Vue ne ménage rien pour plaire à son public étudiant. Recours à un répertoire abordable, embauche d’acteurs du petit écran populaires auprès des jeunes (Marc-André Coallier, Francis Reddy) pour faciliter un contact direct. "Accessibilité" est le mot de passe.

Ce désir de séduire s’accompagne toutefois d’une volonté d’instruire: la présentation du Malade imaginaire donne ainsi lieu à un enrobage pédagogique, où un narrateur vient fournir des repères biographiques entre certaines scènes. Pour uniformiser le tout, le metteur en scène Yvon Bilodeau a aussi imaginé une petite "mise en abyme" (du jamais vu…): ce sont les comédiens de la troupe de Molière qui jouent Le Malade imaginaire – oeuvre dans laquelle l’auteur fait lui-même référence à ses pièces -, partageant en coulisses leurs inquiétudes quant à la santé de l’auteur-acteur. Histoire de préciser le contexte entourant cette comédie paradoxale où un Molière à l’aube de la mort (pris d’un malaise sur scène, il s’éteindra après la quatrième représentation) tourne en dérision les prétentions de la médecine et de ses pédants praticiens.

Ce triple niveau – ce qui ne va pas toujours sans confusion – nous vaut un trop long prologue et quelques échanges superflus, mais aussi une jolie scène, signée Gilbert Dupuis, où la De Brie (juste Louise Laparé) raconte son amour de jeunesse avec Molière. Mais pendant qu’en coulisses, on nous apprend que Molière est mourant, sur scène, on nous sert une comédie aux traits grossis, où cette conscience de la mort n’est guère patente, sauf dans une scène. Les deux ne se contaminent guère…

Joué dans un décor pas inintéressant avec ses lignes déformées, le spectacle comporte quelques trouvailles physiques; et certaines scènes font leur effet: la chanson qui permet aux amoureux (une fraîche Martine Francke et un Coallier pas très moliéresque) de se transmettre un message clandestin; ou les bidonnantes simagrées d’un Antoine Durand, très en forme en prétendant ridicule.

L’ensemble manque toutefois de rigueur, au diapason d’une distribution enthousiaste mais hétérogène, entourant un Jean-Pierre Chartrand honnête mais sans éclat. En Toinette, la soubrette avisée, Isabelle Miquelon mène le bal avec une nature généreuse; bien qu’elle pourrait mieux doser son énergie. En un mot, la subtilité n’est pas au rendez-vous. Factice et grandiloquent dans un personnage qui incarne pourtant le bon sens mesuré, Francis Reddy cabotine de façon plutôt exécrable. La pièce laisse une curieuse impression générale, à mi-chemin entre la pédagogie et la farce…

Jusqu’au 25 novembre
Au Gesù
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