The Best of Paul Taylor : Figure de proue
Scène

The Best of Paul Taylor : Figure de proue

PAUL TAYLOR, dont les oeuvres ont été dansées par plus de 65 compagnies à travers le monde, est un des figures dominantes de la danse en Occident. Les Grands Ballets Canadiens proposent trois pièces du répertoire de la troupe du célèbre chorégraphe  new-yorkais.

Pour leur deuxième spectacle de la saison, les Grands Ballets Canadiens accueillent la Paul Taylor Dance Company. Si la publicité se fait moins sexy que tout ce qu’on a déployé pour Carmen, la troisième visite à Montréal de cette réputée troupe, a de quoi nourrir de grandes attentes.

Considérée comme un chef de file dans l’univers de la danse moderne, cette troupe new-yorkaise fondée en 1955 bénéficie d’une très flatteuse réputation, certains allant même jusqu’à déclarer qu’elle offre "la danse moderne à son meilleur". En attendant d’aller vérifier, il demeure qu’en parcourant la feuille de route de son fondateur, on est impressionné.

Paul Taylor, aujourd’hui âgé de 70 ans, a étudié en peinture avant de choisir la danse. Son art, il l’a appris, développé, perfectionné aux côtés de Martha Graham et Merce Cunningham, tout en osant ses propres créations. Évolution prévisible, elles ont pris le dessus, comme le besoin d’avoir une troupe à lui. Bien sûr, les prix et les honneurs, ça peut laisser froid; mais quand on lit que Paul Taylor, dont les oeuvres ont été dansées par plus de 65 compagnies à travers le monde, a été honoré une cinquantaine de fois, on se rend à l’évidence: nous sommes en présence d’un chorégraphe important.

Que reconnaît-on à son oeuvre D’abord et avant tout sa grande diversité. Quand il est question du style Paul Taylor, les qualificatifs abondent. On vante le lyrisme, la joie, l’étrangeté, la légèreté; mais aussi l’aspect tourmenté de certaines de ses chorégraphies. Immanquablement, toujours, revient le mot humour.

Joint par téléphone, le chorégraphe se montre aussi modeste que délicieux. D’une courtoisie d’un autre temps, et d’une patience infinie… "Je ne peux pas venir chez vous, je suis désolé; mais je suivrai ça de loin. Le spectacle s’intitule The Best of Paul Taylor, ça n’est pas moi qui ai choisi ce titre! Ça n’est pas à moi de juger ça, mais je suis convaincu que la soirée sera assez variée pour vous donner une bonne idée de mon travail."

Il faut savoir que la Paul Taylor Dance Company effectue en ce moment une grande tournée des capitales culturelles du monde, pour marquer les 70 ans de son fondateur, et que la troupe promène plusieurs programmes différents dans ses bagages.

À Montréal, les chorégraphies choisies sont Cascade, Syzygy, et Piazzolla Caldera. Je fais remarquer au prolifique chorégraphe que les trois pièces programmées sont plutôt récentes, datant de 1987, 1997, 1999… "À bien y penser, avec un peu de recul, je pense que le nouveau matériel est meilleur!" répond Taylor d’une voix douce et enjouée.

"Cascade, dansée sur des concertos de Bach, pour piano et orchestre, est une oeuvre plus classique, plus traditionnelle, structurée comme la musique qui l’habille. Syzygy, un terme d’astronomie qui désigne le moment où la Terre et une autre planète sont en conjonction ou en opposition avec le Soleil, est, pour sa part, une pièce assez inhabituelle, complexe. Et compliquée! Ça bouge beaucoup et dans toutes les directions. Les danseurs envahissent la scène, s’éparpillent, se mêlent et se démêlent sur la musique électronique de Donald York. Quant à Piazzolla Caldera, évidemment sur des musiques d’Astor Piazzolla, c’est ma vision du tango, danse familière pour bien des gens. Je n’ai pas fait de réelles recherches sur le tango, mais j’ai lu beaucoup sur ses racines. J’ai voulu évoquer l’atmosphère d’une salle de bal en Amérique latine, et proposer une réflexion sur le contexte social, la guerre des sexes, la lutte des classes."

Assurément, on parle ici d’une grande variété de sujets, de préoccupations et de styles. On regrettera que monsieur Taylor ne soit pas du voyage, mais on pourra, au chapitre des confidences, partager l’expérience d’un membre de la compagnie qui, une heure avant chaque spectacle, rencontrera le public dans le hall de la salle Wilfrid-Pelletier.

Enfin, comme ce n’est pas tous les jours qu’on a au bout du fil une figure dominante de la danse moderne, qui peut revendiquer 45 ans de carrière, profitons-en pour recueillir l’avis d’un sage observateur, encore allumé: "Des artistes à surveiller en ce moment parmi les jeunes chorégraphes? Sans aucun doute Lyla York et Susan Marshal. Elles ont dansé avec nous, mais volent maintenant de leurs propres ailes. Elles sont différentes, mais chacune m’impressionne!". C’est noté.

Les 23, 24, 25 novembre
À la salle Wilfrid-Pelletier Place des Arts
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