Visitatio : Un ange passe
De très belles images font-elles du bon théâtre? Visitatio, le dernier spectacle de Daniele Finzi Pasca, en coproduction avec le Teatro Sunil et Carbone 14, qui a pris l’affiche de l’Usine C la semaine dernière, n’arrive pas à donner de réponses valables.
De très belles images font-elles du bon théâtre? Visitatio, le dernier spectacle de Daniele Finzi Pasca, en coproduction avec le Teatro Sunil et Carbone 14, qui a pris l’affiche de l’Usine C la semaine dernière, n’arrive pas à donner de réponses valables. Ce spectacle résolument poétique, porté par de magnifiques tableaux sans toutefois de véritables liens les uns entre les autres, ne parvient pas à communiquer clairement ses intentions au public.
Pourtant, j’avais été enchanté par la démarche artistique du metteur en scène suisse, lors de la présentation à Montréal d’Icaro et de Giacobe. Il faut dire que ces deux précédentes créations étaient des solos dans lesquels la présence charismatique de Daniele Finzi Pasca contribuait à donner beaucoup de grâce à sa proposition théâtrale.
Cette fois-ci, le créateur signe le texte et la mise en scène, mais n’apparaît pas sur scène. Il a plutôt dirigé une troupe de sept interprètes (dont le jeu est très inégal) issus autant du Teatro Sunil (Dolores Heredia, l’actrice la plus convaincant du lot, Hugo Gargiulo et Antonio Vergamini) que de Carbone 14 (Katia Gagné, Yves Simard et Lin Snelling) ainsi qu’Ana Heredia, soeur de Dolores, une femme trisomique pour qui il s’agit d’une première participation au théâtre.
Avec des gens qui proviennent de diverses origines et disciplines (danse ou théâtre), le metteur en scène semble avoir voulu plaire à tout le monde. Ce faisant, il a omis de donner une ligne directrice et une théâtralité claire à Visitatio. On se retrouve devant une pièce hybride, éclatée, dans laquelle les comédiens semblent chercher la raison qui les a motivés à monter sur scène…
Plusieurs images fortes marquent cependant la représentation: un ange qui passe au-dessus du plateau; une comédienne dansant sur des débris de porcelaine; un clown suspendu dans les cintres qui traverse la scène à bicyclette; et celle aussi, magnifique, d’Ana Heredia seule à l’arrière de la scène devant une immense fresque représentant un ciel à la Magritte. D’autres, un peu plus clichés: les danseurs en jupe faisant des pointes comme dans les Ballets Trocadéro.
"Visitatio" est un mot italien qui fait référence aux moments de prémonition qui arrivent parfois dans nos vies. À l’origine, le spectacle devait s’intituler "Le Quai", parce que les personnages se rencontrent sur un quai, face à la mer, pour y faire le point sur leur vie. Mais il aurait pu tout aussi bien s’appeler "La Quête du sens".
Car Visitatio est une oeuvre sur le processus de création et la recherche, avec laquelle Finzi Pasca prend un malin plaisir à mélanger les genres. Le récit revient sans cesse sur les doutes et les interrogations qui hantent les artistes et les concepteurs en coulisses. Les personnages abordent la différence entre un danseur et un acteur, la souffrance et le plaisir dans le jeu, et font même un clin d’oeil aux limites de la coproduction… Amusant, ce regard introspectif sur la création plaira surtout aux initiés.
D’entrée de jeu, un personnage lance: "Tout a été dit." Pourquoi donc s’acharner à créer de nouvelles formes, pourrait-on ajouter. Car, au bout du compte, Visitatio m’a laissé perplexe et le propos m’a semblé moins universel que celui d’Icaro. Lorsqu’un auteur raconte quelque chose, il est toujours préférable d’avoir un point de vue. Cela donne une histoire plus intéressante.
Jusqu’au 9 décembre (du mardi au samedi)
À l’Usine C
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