Frédéric Teyssier : Boîte à surprise
Pour la troisième fois en moins de deux ans, Frédéric Teyssier et sa bande présenteront une création théâtrale… dans un gigantesque labyrinthe de carton!
Pour la troisième fois en moins de deux ans, Frédéric Teyssier et sa bande présenteront une création théâtrale… dans un gigantesque labyrinthe de carton! Après la 3e Messe pour le début de la fin des temps, un happening de quatre soirs présenté dans les locaux de Momentum en 1999, puis la reprise de ce spectacle au Festival Transnational Châlon dans la rue, les quatre bricoleurs de la compagnie L’Ange à deux têtes (outre Teyssier: Guillaume Chouinard, Éric Forget et Michel-André Cardin) présentent à l’Espace Libre La Gueule du loup, un événement pour aventureux non -claustrophobes. Plus de 30 000 pieds cubes de carton serviront à construire l’espace scénique dans lequel les spectateurs se déplaceront, munis d’une lampe de poche. Frédéric Teyssier le précise d’entrée de jeu: La Gueule du loup n’est pas la reprise de La Boâte, la messe présentée en collaboration avec Momentum, mais une création toute neuve. "Cette fois, la pièce traite de la peur du loup, une bête qui a une présence énorme dans la mythologie occidentale."
Par groupes de vingt, les spectateurs marcheront et ramperont dans le noir. "Ce que l’on présente, c’est une histoire que les gens ne connaissent pas, inspirée du conte du Petit Chaperon rouge et de tout ce qui a rapport au loup", explique Frédéric Teyssier. L’ambition et la créativité des artisans de cet étrange événement semblent être inversement proportionnelles aux moyens financiers dont ils disposent, soit à peine 9000 dollars! "Le Conseil des arts et des lettres du Québec a refusé de subventionner le spectacle en nous disant qu’il s’agissait d’une reprise, alors que son pendant fédéral, lui, a tripé sur le projet. J’ai tenté de leur expliquer que quand un sculpteur faisait une oeuvre, puis une autre, on ne disait pas qu’il faisait la même chose parce qu’il avait encore utilisé du bois! Pourquoi s’entêtent-ils à ne financer qu’une élite intellectuelle qui fait dans la continuité "vedettique"?"
En deux semaines, Teyssier et compagnie devront transformer 1000 feuilles de carton, de quatre pieds par huit, en quatre espaces de jeu, reliés par des couloirs, galeries, escaliers, tubes, etc. "Les participants se promèneront partout, même dans la salle de répétition, les escaliers et les loges! Éric Forget a fait le travail sonore, tandis que Guillaume Chouinard a dessiné les plans et sera le chef de chantier; Michel-André Cardin, lui, s’est occupé des accessoires et de la décoration." Une fois les représentations terminées, leur oeuvre sera entièrement recyclée. Tout sera donc détruit? "Oui, et ça symbolise bien ce qui est vécu en théâtre, souligne Frédéric Teyssier. Une création, c’est souvent un an de travail, qui disparaît ensuite…"
Ensemble, ils ont conçu deux versions de La Gueule du loup. "Il y a un show pour toute la famille (déconseillé aux bambins de moins de huit ans) et un autre pour les adultes seulement, beaucoup trop osé pour les enfants! On a décidé d’offrir ces deux versions parce qu’un show dans une boîte, c’est trop ludique pour ne pas y inviter le jeune public. Je crois que le grand méchant loup n’a pas la même signification pour tous. Pour les adultes, il représente le côté weird de l’homme…" Sans être une source de cauchemars pour les bambins, l’heure passée dans la structure de carton aura quelque chose d’initiatique, promet-il. "On fait appel à l’imaginaire, on ne veut pas que les jeunes soient passifs, comme à Disney. Ils seront confrontés à leurs peurs. C’est interactif dans le sens où chacun est soumis au rayon lumineux de sa lampe de poche. En fait, personne ne verra le même show."
Ardent défenseur du théâtre de rue, Frédéric Teyssier se définit avant tout comme un saltimbanque. Selon lui, les arts vivants sont injustement boudés en cette ère d’Internet. "Avec L’Ange à deux têtes, on s’est dit: fuck le multimédia! Notre haute vitesse à nous, elle est dans notre tête. En Europe, le théâtre de rue a explosé au cours des dix dernières années alors qu’ici, on ne présente pratiquement que des drames sociaux racoleurs et emmerdants! On veut revenir à l’imaginaire. Et aux arts vivants, faits de chair, de sueur et d’odeurs…"
Du 4 au 27 janvier
À l’Espace Libre