Scène

La Gueule du loup : La bête humaine

Avec La Gueule du loup, L’Ange à deux têtes propose une aventure multisensorielle, interactive et inoubliable pour toute la famille, bricolée avec un enthousiasme inversement proportionnel aux moyens financiers de la compagnie.

Avec La Gueule du loup, L’Ange à deux têtes propose une aventure multisensorielle, interactive et inoubliable pour toute la famille, bricolée avec un enthousiasme inversement proportionnel aux moyens financiers de la compagnie. Ce faisant, ce regroupement de patenteux de l’art théâtral prouve qu’il est encore possible de séduire les petits et les grands sans avoir recours au multimédia et aux effets spéciaux, avec des arts vivants, "suants, sensuels et odorants"…

L’ambitieuse création se déroule dans un sinueux labyrinthe de 30 000 pieds cubes de carton, qui occupe l’Espace Libre en entier. À leur arrivée, les spectateurs sont invités à se déchausser. Puis, munis de leur lampe de poche, ils entrent par groupes de 20 dans une sorte d’antichambre, plongée dans le noir. Une charmante bergère (Diane Pronovost) désigne le chef du troupeau. Elle invite les moutons-spectateurs à la suivre dans un sombre couloir cartonné. Et l’aventure commence… Quatre espaces, reliés par des corridors qui obliquent, des escaliers et des passages si étroits qu’il faut s’accroupir pour les franchir, seront tour à tour visités. Dans chacun de ces lieux, les participants rencontront les acteurs de cette adaptation très (très) libre de l’histoire du Petit Chaperon rouge. Il y a la bergère, bien sûr, mais aussi un terrible chasseur (Richard Lemire) au fusil impressionnant et un méchant loup (Guillaume Chouinard), plus vrai que nature.

Entièrement faite de carton et de colle blanche, la gigantesque construction est un chef d’oeuvre de bricolage et d’ingéniosité. Le maître des opérations, Guillaume Chouinard, et le concepteur des accessoires et décors, Michel-André Cardin, ont travaillé avec minutie. Et l’efficace bande sonore d’Éric Forget ajoute à l’étrangeté de l’atmosphère des lieux. Seule ombre au tableau: l’histoire (un texte de Frédéric Teyssier) est difficile à suivre, peut-être trop complexe pour la capacité d’écoute des groupes désorientés qui font irruption dans quatre espaces de jeu. Il faut dire que les comédiens la racontent en regardant leurs visiteurs dans le blanc des yeux, une proximité qui ne facilite pas la concentration…

Au bout d’un peu moins d’une heure, le troupeau se retrouve dans le hall d’accueil, heureux d’avoir échappé aux griffes du loup et dompté les frayeurs qui naissent dans le noir. "Entrer dans la Boâte, c’est accepter cette rencontre avec soi-même sans se soucier des réfractaires à l’enfance qui pourraient bouder à vos côtés", peut-on lire dans le programme. Parions qu’ils seront peu nombreux à se priver du plaisir de se transformer en acteurs, le temps d’affronter leurs peurs…

Jusqu’au 27 janvier
À l’Espace Libre