Humus / Solitudes : Seconde Nature
Scène

Humus / Solitudes : Seconde Nature

Invité par Montréal Danse à concevoir une toute nouvelle pièce pour son équipe de danseurs, le chorégraphe israélien Avi Kaiser a choisi de nous parler… de nous.

Invité par Montréal Danse à concevoir une toute nouvelle pièce pour son équipe de danseurs, le chorégraphe israélien Avi Kaiser a choisi de nous parler… de nous. C’est la culture québécoise qui l’aura inspiré, après avoir côtoyé les interprètes d’ici. C’est avec plaisir et étonnement qu’on peut remarquer que le créateur joue des clichés et des stéréotypes avec un humour charmant. Et le spectacle qui en découle est une véritable bouffée de fraîcheur.

La pièce commence dans un décor de bûches. Tous les danseurs, étendus sur le sol, tour à tour et a cappella, entonnent "V’la l’bon vent v’la l’joli vent" timidement ou avec assurance, c’est selon.

L’image est jolie; le public, à la fois attendri et amusé. Puis, à force de contorsions, les sept danseurs ayant pris d’assaut un monticule de terre, le transforment en un véritable et inusité tapis végétal. Ça sent la forêt. Avec un parfum de vieilles légendes.

Visiblement, les arbres et la nature ont marqué le chorégraphe, qui a aussi choisi d’oser notre folklore. Ainsi, sur des musiques de la Bottine Souriante ou sur les envolées du violon de Ti-Jean Carignan, les danseurs s’en donneront à coeur joie, l’air coquin. Même esprit de vacances et d’école buissonnière quand ils se déhancheront délicieusement au son de Tico tico, popularisée par Alys Robi. Si les costumes, très quotidiens, sont d’un terne désolant, la chorégraphie, elle, est fluide, plutôt joyeuse, même d’une rare sérénité. Bien sûr, le regard que pose Avi Kaiser sur notre culture tient plus du coup de foudre, du clin d’oeil, du polaroid, que de l’étude profonde; mais le spectacle assume pleinement sa légèreté aussi bien que ses moments de pudeur. Il y a évidemment un second degré dans cette démarche carte postale! Les danseurs sont infiniment complices, vigoureux. On les sent contents, presque fébriles de participer à cette chorégraphie enlevante et enlevée, étonnante et étonnée.

Le fait qu’elle soit présentée à la Cinquième salle de la Place des Arts, ajoute aussi au charme. Ce lieu, pas assez exploité, se prête parfaitement à la danse. On voit bien de partout, et le climat intime n’est pas ici une invention.

En première partie du spectacle, Montréal Danse reprend Solitudes, une pièce de Dominique Porte, créée il y a près d’un an, mais remodelée depuis. Il s’agit d’une chorégraphie pour quatre danseurs, conçue à partir d’improvisations et bribes de conversations, réunies en une bande sonore savamment concoctée par Laurent Maslé. Cette pièce d’une vingtaine de minutes n’a pas la tristesse que le titre pourrait laisser craindre, mais toute la rigueur d’une réflexion pourtant ouverte. Encore ici, les interprètes de Montréal Danse font preuve d’une enviable polyvalence.

Soirée de découvertes donc, qui amène le spectateur à fréquenter deux univers complètement différents: le premier, plus abstrait et plus complexe; et le second, plus festif et probablement plus accessible. Dans un cas comme dans l’autre, la joie semble l’emporter. Sous la glace de février, ce n’est pas du luxe.

Jusqu’au 17 février 2001
À la Cinquième Salle de la Place des Arts