Le Petit-maître corrigé : Je t'aime, moi non plus
Scène

Le Petit-maître corrigé : Je t’aime, moi non plus

Pour sa première mise en scène en sol québécois, Maka Kotto a choisi une oeuvre mineure d’un auteur majeur, Le Petit-maître corrigé, de Marivaux.

Pour sa première mise en scène en sol québécois, Maka Kotto a choisi une pièce mineure d’un auteur majeur, Le Petit-maître corrigé, de Marivaux. Ce texte peu joué, jamais monté professionnellement de ce côté-ci de la grande mare, connut un échec lors de sa création en 1734. Cette comédie sur l’amour qui craint de se montrer est reprise en autogéré par Les Acteurs associés, un regroupement de comédiens oeuvrant principalement à la télévision.

Toute la pièce tourne autour de la question fétiche de Richard Desjardins, "tu m’aimes-tu?", et de sa petite soeur, "tu vas-tu finir par le dire?". Rosimond (Fabien Dupuis) est un jeune élégant parisien aux manières prétentieuses, promis par des parents désargentés à Hortense (Geneviève Cocke), une beauté de la campagne. Charmé par la belle, il se comporte avec elle comme un goujat, convaincu qu’il aura l’air ridicule s’il déclare son amour. Avec l’aide de sa soubrette Marton (Manon Arsenault) et du serviteur de Rosimond (Sylvain Massé), Hortense tentera de faire perdre ses grands airs à Rosimond et de lui faire avouer ses sentiments. Pour ajouter quelques imbroglios à la chose, un couple d’amis du bellâtre tentera de faire échouer le mariage: Dorimène (Katherine Adams), en essayant de reconquérir le coeur de Rosimond, et Dorante (Laurent Imbault), en mettant tout en oeuvre pour séduire la charmante Hortense.

Au-delà d’une intrigue amoureuse dont l’issue est évidente, Marivaux offre une cinglante caricature de la peur de l’engagement et de cette propension à rationaliser l’amour qui nous mène à parler plus qu’à agir. Des préoccupations qui n’ont pas pris une ride, et qui font aujourd’hui le succès d’une pléiade d’oeuvres destinées aux thirtysomething, comme La Vie, la vie

Avant Le Petit-maître corrigé, Maka Kotto a réalisé quelques mises en scène à Paris, où il a terminé des études en art dramatique et entrepris une carrière d’acteur de cinéma. C’est avec aisance et doigté qu’il dirige une distribution qui se révèle, toutefois, bien inégale. Ceux qui impressionnent le plus sont: Geneviève Cocke, qui apporte une grâce mutine et beaucoup de fraîcheur à son personnage; Manon Arsenault, ingénue sans être cabotine; Fabien Dupuis, fanfaron à souhait, rappelant un peu Éric Bernier dans le film ; et enfin, Sylvain Massé, certainement celui qui a le plus de présence sur scène.

"Monter un Marivaux en autogéré? Faut être missionnaire!" écrivent les Acteurs associés dans le programme. Et c’est vrai que les concepteurs ont fait beaucoup avec peu. La scénographie de Danielle Ross est dépouillée mais efficace; et ses costumes frôlent le kitsch, rappelant par leurs coupes et leurs couleurs le début des années 80. Un bon flash que d’avoir réparti les couleurs des vêtements en trois tons, un pour les jeunes amoureux, un pour les trouble-fête et un pour les serviteurs. Missionnaires, les comédiens le sont aussi en avouant chercher à tirer profit de leur notoriété télévisuelle pour attirer des jeunes au théâtre…

Jusqu’au 3 mars
À la Salle Fred-Barry