La Chambre bleue : Pour une histoire d’un soir
"Dix aventures d’un soir, entre cinq hommes et cinq femmes, qui vont se croiser inévitablement, jouées par deux comédiens: ce serait le résumé le plus simple" avance le metteur en scène SERGE DENONCOURT au sujet de La Chambre bleue, production du Rideau Vert qui prend ces jours-ci la route de la tournée.
"C’est une pièce sur le désir et sur notre difficulté à nous impliquer à long terme avec quelqu’un, explique Serge Denoncourt. Tous ces personnages ont la même envie: être aimé. Ils ont des besoins sexuels, les assouvissent, et se rendent ensuite compte que ce n’est pas tout à fait ça qu’ils voulaient. C’est donc assez actuel; mais ça va l’être dans 100 ans, comme ça l’était il y a plusieurs années."
Pour écrire La Chambre bleue, l’auteur anglais David Hare s’est en effet inspiré de La Ronde, d’Arthur Schnitzler, datant de 1912. "C’est vraiment le même principe. Ce qu’a fait David Hare, c’est de l’actualiser pour qu’on se reconnaisse." La Ronde, dépeignant les moeurs de la société viennoise de la fin du XIXe siècle, avait causé scandale à Berlin et à Vienne lors des représentations de 1920 et 1921: pour la première fois sur scène, on traitait des relations sexuelles.
Issus de milieux divers, les 10 personnages de la pièce se croisent et se séduisent, valse parfois drôle, parfois amère, en 10 tableaux aux tons très différents. "L’unité du spectacle, évidemment, c’est le fil rouge du désir. On suit ce fil-là", jusqu’à ce que la boucle des rencontres soit bouclée: la prostituée rencontre le chauffeur de taxi qui rencontre la jeune fille au pair…, ainsi de suite jusqu’à ce que l’aristocrate rencontre la prostituée. Quelques éléments et un décor stylisé suffisent à suggérer, dans une scénographie toute simple, les différents lieux où se déroule l’action (décors: Louise Campeau, costumes: François Barbeau).
La pièce repose donc, essentiellement, sur le jeu des comédiens; Pascale Desrochers et Normand D’Amour incarnent à deux tous les personnages. "La difficulté pour eux, commente le metteur en scène, ce n’est pas tant de jouer des personnages différents que de changer de style. C’est tout un défi, et c’est pour ça qu’ils avaient envie de le faire."
Enthousiaste, Denoncourt poursuit: "Dans le cas présent, je fais de "l’hyper" direction d’acteurs. Et la direction d’acteurs, c’est ce que je préfère. Je pense que je dirige bien les comédiens; j’aime ça, ils aiment ça, en général, être dirigés par moi, parce que je demande des choses qu’ils ne sont pas nécessairement habitués à faire."
Comment s’y prend-il? "Quand je me retrouve dans une salle de répétition, peu importe le spectacle, c’est toujours le même travail: je demande un travail de grande précision émotive. Je ne suis pas quelqu’un qui laisse une grande liberté de mouvement, de geste aux acteurs; par contre, je laisse énormément de place à l’état de l’acteur. Mais ma mise en scène est très précise, mon rythme est très précis. Les acteurs, parfois, trouvent ça difficile, pour finalement se rendre compte que ça donne des ailes. Une fois que tout est bien goupillé, il ne reste qu’à jouer. Tu peux aller chercher tout ce que t’as, parce que le reste, tu le contrôles. C’est ma technique… et je l’aime assez."
À voir, bientôt, le résultat de ce projet élaboré avec grand plaisir: "on a un fun noir!" s’exclame le metteur en scène.
Les 6 et 7 mars
À la salle Albert-Rousseau
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