Ballets Jazz de Montréal : Double personnalité
Scène

Ballets Jazz de Montréal : Double personnalité

Que les mauvaises langues se le tiennent pour dit: le ballet jazz n’est pas mort. Depuis qu’il est à la tête de la direction des Ballets Jazz de Montréal, LOUIS ROBITAIILLE fait tout en son pouvoir pour donner un second souffle à la compagnie.

Louis Robitaille a pris la direction des Ballets Jazz de Montréal en 1998. Depuis, la troupe a des ailes. C’est que l’ancien premier danseur des Grands Ballets Canadiens de Montréal n’a pas ménagé ses efforts pour que la compagnie née au début des années 70 se défasse de son style démodé. Son voeu le plus cher: se tailler une niche respectable entre les compagnies de danse contemporaine et les Grands Ballets.

Pour ce faire, il a entrepris un sérieux ménage dans le répertoire et introduit des pièces néoclassiques. Enfin, il a adopté l’Espace Go comme lieu de diffusion, rajeunissant du même coup le public des BJM. Que les mauvaises langues se le tiennent pour dit : le ballet jazz n’est pas mort pour autant. Son style fluide marque toujours les spectacles des BJM. "La compagnie est en pleine évolution, affirme son directeur artistique. Si le ballet jazz doit rester, il restera. L’important, c’est de rejoindre le grand public et de le faire sans brusquer les choses."

N’empêche que le directeur artistique privilégie le néoclassicicisme parmi les chorégraphes montants. Dans quelques jours, les 12 interprètes des BJM livreront un programme basé sur l’utilisation de l’espace, du temps et de la lumière. L’Américaine Mia Michaels et le Français Patrick Delcroix signent des ballets jazzés et innovateurs, alors que les Canadiennes Dominique Dumais et Crystal Pite, tout comme l’Américain Nicolo Fonte, fraient dans l’univers néoclassique. "C’est important de présenter une soirée équilibrée et construite de façon serrée, explique Louis Robitaille. Les pièces s’enchaînent sans qu’il y ait de temps morts."

Mélange de comédie de Broadway et de ballet jazz, la très joyeuse pièce de Mia Michaels, No Strings Attached, fut présentée pour la première fois aux BJM l’année dernière. Sa reprise ne surprend guère. "C’est le plus grand succès de notre répertoire", dit Louis Robitaille.

Par ailleurs, le directeur artistique a eu un coup de coeur pour le ballet de Patrick Delcroix, qui fut créé, en 1995, pour la défunte compagnie néerlandaise Djazzex. Membre depuis 15 ans du Netherlands Dance Theater, il a conçu un ballet qui situe les danseuses sur un podium, au-dessus de leurs partenaires masculins qui occupent la scène. La structure chorégraphique et la trame musicale Sous le rythme, je… risquent d’étonner. "Je n’arrivais pas à trouver une musique à ma convenance. C’est pourquoi j’ai demandé aux danseurs de chanter ou de faire les percussions", raconte-t-il.

Originaire du Lac-Saint-Jean, Dominique Dumais travaille avec succès à Toronto depuis une dizaine d’années. Associée au courant néoclassique, elle présente un court extrait de sa prochaine création aux BJM. Nicolo Fonte a conçu pour sa part une oeuvre de groupe d’une vingtaine de minutes. Né à Brooklyn, il danse depuis neuf ans pour Nacho Duato. On note dans son travail une nette influence des chorégraphes européens. "Beaucoup d’énergie se dégage de Floating World, dit-il. J’ai voulu recréer l’atmosphère d’un autre monde."

Enfin, les BJM vivent une histoire d’amour avec Crystal Pite. Celle-ci leur avait créé un ballet en 1995. Originaire de la Colombie-Britannique, la chorégraphe-danseuse évolue depuis cinq ans au Frankfurt Ballet, auprès du réputé chorégraphe William Forsythe. Les BJM lui ont offert le statut de chorégraphe résidente pour trois ans. Elle leur créera une trilogie, qui s’ouvre cette année avec Two Dances For Jane. "Bien que personnelle, sa danse est marquée par l’influence du Frankfurt Ballet", juge Louis Robitaille.

Les chorégraphes qui rêvent de créer en toute liberté risquent de mordre la poussière avec le directeur artistique des BJM. Celui-ci se mêle de tout, du choix de la musique à la conception des éclairages en passant par le type d’interprétation. "Je suis emmerdant", avoue-t-il en souriant. "Il ne l’est pas tant que ça, nuance son ancien collègue des Grands Ballets Canadiens de Montréal, Nicolo Fonte. Il tient surtout à ce que la personnalité des danseurs ressorte sur scène."

Même si sa seule présence sur scène constitue une bonne raison de voir les BJM, le beau et talentueux directeur artistique a décidé qu’il ne ferait pas partie de la distribution cette année. "Je me retire pour avoir un meilleur oeil extérieur", dit-il. Mais il est difficile de rester dans l’ombre lorsqu’on a longtemps brillé sous les feux de la rampe: le grand blond à l’allure d’éternel jeune premier fera sans doute un passage éclair sur scène. C’est mieux que rien, me direz-vous…

Du 4 au 15 avril
À l’Espace Go