Philippe Soldevila : Critique: Chroniques de la vérité occulte
Scène

Philippe Soldevila : Critique: Chroniques de la vérité occulte

Depuis la fondation de Sortie de Secours, il y a 10 ans, Philippe Soldevila file vers des desseins hispaniques et nous introduit à cette culture par le biais de créations et de textes d’auteurs ici méconnus.

Depuis la fondation de Sortie de Secours, il y a 10 ans, Philippe Soldevila file vers des desseins hispaniques et nous introduit à cette culture par le biais de créations et de textes d’auteurs ici méconnus. Cette fois, il a traduit et adapté Pede Calders, un auteur catalan forcé à l’exil durant la guerre civile des années 1936-1939, période qui se révéla féconde, comme en témoignent les Chroniques de la vérité occulte, un recueil de nouvelles qui marient finement humour et subversion.

Si l’idée d’adapter ces bribes de prose à la scène se révèle heureuse, elle n’en est pas moins truffée d’audace; en effet, le Théâtre Périscope prend un risque en amorçant sa saison avec, en tête d’affiche, un spectacle aussi singulier. Les premières minutes de la représentation peuvent d’ailleurs laisser le spectateur perplexe, se demandant s’il assistera à une suite d’historiettes défilant linéairement, un peu trop figées dans le contexte littéraire dans lequel elles ont été assemblées. Soldevila a cependant su enjamber cet écueil, et c’est sous une forme originale, brodée de chassés-croisés ingénieux entre les contes, que s’élabore la représentation. On se laisse entraîner dans cette entreprise ludique où le plaisir évident des acteurs à nous faire connaître l’univers de Calders se révèle contagieux. Le choix de la distribution, la répartition des rôles et l’interprétation de tous les comédiens, empreinte chez chacun d’une créativité personnelle qui confère relief et saveur à l’ensemble, sont des éléments fondateurs d’un style qu’on reconnaît désormais à Soldevila, metteur en scène. Son retour à la scène comme comédien, dans le rôle de l’auteur procédant à une autoanalyse de ses oeuvres et intervenant, un peu moraliste, entre les chroniques, est moins réussi: on se passerait de ces intermèdes un peu trop didactiques qui, finalement, nous écartent du propos de la pièce et brisent le rythme agilement soutenu par les comédiens, déjà plus qu’occupés à voir aux multiples détails techniques que leur impute leur jeu. Car, s’inscrivant dans un courant qui commence à faire école au Québec, le comédien devient à la fois musicien, acrobate, pantomime, accessoiriste; avec des moyens limités, on arrive à animer une scénographie somme toute dépouillée, mais efficace.

Jusqu’au 6 octobre
Au Théâtre Périscope