La terre est tellement grande… : Histoires de fille
Margaret McBrearty n’est pas qu’une bonne conteuse, c’est aussi une fine observatrice. C’est ce qu’elle démontre avec La terre est tellement grande…, son excellent premier one woman show, présenté les dimanches et lundis d’octobre à La Petite Licorne.
Margaret McBrearty
n’est pas qu’une bonne conteuse, c’est aussi une fine observatrice. C’est ce qu’elle démontre avec La terre est tellement grande…, son excellent premier one woman show, présenté les dimanches et lundis d’octobre à La Petite Licorne. Joué sur diverses scènes de la région depuis deux ans, ce spectacle de contes bien rodé met en scène Jeanne Mongeau, une jeune femme dont le passe-temps favori est de prêter oreille aux conversations d’inconnus. Des êtres ordinaires qui deviennent les stars de délicieux contes urbains. Margaret McBrearty semble convaincue que le meilleur théâtre demeure, encore et toujours, la réalité…
La comédienne accueille le public avec une certaine fébrilité. C’est qu’elle vient à peine de dénicher son personnage, explique-t-elle, et qu’il n’est pas encore tout à fait "arrivé". Elle se glisse finalement dans la peau de Jeanne, une ancienne squeegee croisée dans un delicatessen, dont le grand-père était un conteur hors pair, pour nous raconter les péripéties d’une demi-douzaine d’attachants quidams.
D’abord, une madame de la rue Masson, qui rencontre ses anciens voisins dans un autobus. "Vous étiez tellement bruyants en faisant l’amour!", leur lancera-telle sur un ton envieux. La pauvre femme se rend au Casino pour oublier son mari, qui ne la désire plus. Avec sa fausse bonne humeur cachant mal une grande détresse, elle rappelle la mère incarnée par Louison Danis dans 24 poses (portraits), de Serge Boucher. On aura ensuite droit à un tour de métro en compagnie d’une ex-ballerine russe qui parle un français à la Sol, affirmant que "l’argent n’a pas de douleur" et rêvant d’accéder au "cauchemar américain".
Puis, Jeanne nous raconte la triste histoire d’un gars de la construction qui est passé à côté de la "mademoiselle" de ses rêves pour ne pas avoir l’air moumoune devant ses chums. Et qui le regrette chaque jour depuis… Le plus beau personnage de la soirée est certainement la tante gaspésienne de Jeanne, qui, à 76 ans, parle avec espièglerie de la nouvelle lubie de sa fille lesbienne, qui veut la faire témoigner devant un groupe. Une vieille haïssable qui aime la vie avec une fougue qui garde son coeur jeune…
Dirigée par Nadia Drouin, Margaret McBrearty se révèle une comédienne talentueuse et charismatique, capable de rendre ses personnages crédibles sans costumes, ni accessoires. Du théâtre brut qui nous ramène à l’essentiel. Il faut la voir en macho de la construction qui s’arrache le plus naturellement du monde une touffe de poils des oreilles! Ses contes sont, en quelque sorte, la version light de ceux d’Yvan Bienvenue, souvent sombres et tordus.
Avec ce premier spectacle solo, Margaret McBrearty brise joliment la glace en traçant avec adresse le portait d’êtres uniques, drôles et captivants. Et si l’auteure et comédienne démontre un grand intérêt pour autrui, le public rivé à ses lèvres le lui rend bien…
Jusqu’au 22 octobre (les dimanches et lundis)
La Petite Licorne