De la vie, entre autres choses : Mise à nu
Scène

De la vie, entre autres choses : Mise à nu

De la vie, entre autres choses pourrait constituer pour le néophyte une bonne introduction à l’univers d’Yvan Bienvenue. Créé à Fred-Barry, ce spectacle en trois temps expose la plupart des facettes du créateur des Contes urbains.

De la vie, entre autres choses

pourrait constituer pour le néophyte une bonne introduction à l’univers d’Yvan Bienvenue. Créé à Fred-Barry, ce spectacle en trois temps expose la plupart des facettes du créateur des Contes urbains: sa dimension noire et très crue, ses occasionnelles logorrhées de poète engagé, et sa veine mélo. Du Yvan Bienvenue 301, quoi…

Les personnages de ces trois courtes histoires sont des marginaux qui paient le prix de leur différence. À commencer par La nuit où ils ont tué le gros comédien, qui nous sert le langage vulgaire de la rue dans toute sa nudité crue. Un acteur complètement bourré (Jean-Guy Bouchard) ramène chez lui un prostitué récalcitrant (Martin Desgagné). Mais ce dernier décide de profiter de la présence inopinée d’un petit mendiant (Paul-Patrick Charbonneau, dans une composition fébrile) pour plutôt tenter de voler son client. La panique aidant, les choses tourneront mal…

Yvan Bienvenue met à nu des détresses qu’il renvoie dos à dos: l’assassin malgré lui, un jeune junkie geignard, est aussi pathétique que la victime, homosexuel "qui ne pogne pas" visiblement condamné à la solitude, qui achète, avec peu d’élégance, les faveurs sexuelles d’une petite frappe qui le méprise ouvertement. Mais, au-delà de sa charge de violence et de désespoir à l’état brut, le texte finit par tourner en rond, restant au premier degré de son récit.

Dirigé avec délicatesse par le metteur en scène Antoine Laprise, Mélodrame rend pleinement justice à son titre. Se croyant gravement malade, une mère qui a élevé seule un fils intellectuellement déficient redoute qu’on ne place son grand bébé de 37 ans. Rejetant l’aide d’un travailleur social bien intentionné, la vieille dame refuse de se séparer de son cher fiston. Malgré sa finale inutilement cruelle, cette anecdote très simple, montée sans artifices, est portée par la sobre et touchante prestation de Francine Beaudry.

Sorte d’hommage à Claude Gauvreau, Claude et Mussolini ramène la figure du poète écorché et "pur", en butte à l’Ordre. Emmené au poste par un flic brutal qui l’a découvert au cimetière Côte-des-Neiges, un homme couvert de crasse raconte une étrange histoire à une policière qui s’impatiente devant ses digressions.

La drôlerie intermittente de cette séance d’interrogatoire naît du choc bien campé entre, d’un côté, le prosaïsme et le rude bon sens de la policière (Caroline Lavoie, parfaitement crédible); et, de l’autre, les envolées désincarnées de l’auteur qui plaide contre la censure et pour le respect de l’oeuvre. Et qui se reproche d’avoir déjà joué, à l’École nationale de théâtre, une production écourtée de L’Asile de la pureté, trahissant ainsi Gauvreau…

Truffé de références au milieu théâtral, introduit par la projection d’images violentes extraites de manifs antimondialisation, Claude et Mussolini est lourdement investi d’un "message". Si on s’agace de ses sentences, ce texte, verbeux mais intrigant, est pourtant la plus riche des trois histoires, à cause notamment de la tension qui s’y joue entre deux univers contradictoires.

Par leur argument très simple et linéaire, les deux autres présentent une facture assez unidimensionnelle, qui convient peut-être mieux à un conte qu’à une pièce.

Jusqu’au 24 novembre
À la Salle Fred-Barry