Pascale Houbin : Parole d’honneur
Au moment de la création de Parole, la Française Pascale Houbin a travaillé en silence avec ses collaborateurs. Ce procédé pour le moins intrigant a, toutefois, largement rapporté sur le plan créatif.
Au moment de la création de Parole, la Française Pascale Houbin a travaillé en silence avec ses collaborateurs. Ce procédé pour le moins intrigant a, toutefois, largement rapporté sur le plan créatif. "Il y a plein de manières de communiquer autrement que par la parole. Vous savez, c’était loin d’être silencieux entre nous. Comment dire… On n’a pas discuté du spectacle, on l’a fait!" déclarait-elle en entrevue téléphonique à Voir, la semaine dernière.
Avec le comédien sourd d’origine turque Levent Beskardes et le conteur français Abbi Patrix, cette ancienne interprète de Daniel Larrieu nous livrera, au Théâtre Prospero, une rencontre poétique entre les langages du geste, de la parole et des signes. Ou, comme l’annonce le communiqué de presse, entre la main, la bouche et le pied. Accompagné par une musique au piano, ce spectacle tout simple en apparence dévoile, au gré de son évolution, une profondeur humaine insoupçonnée. "C’est une manière artistique de parler de la vie d’aujourd’hui. Nous évoluons dans un monde où les frontières éclatent, où les langues et les cultures se mélangent…"
Pascale Houbin n’en est pas à ses premières armes avec le langage des sourds-muets. Au début de sa carrière, la chorégraphe-danseuse avait collaboré avec un comédien malentendant. Par la suite, l’artiste de 45 ans a entamé une série de solos, toujours en s’inspirant du langage des signes. Nous avons d’ailleurs pu voir l’un d’eux, Germen et Soma, à Tangente, en 1997. "C’est vrai que ce type de langage est à la base de mon écriture chorégraphique. Pourtant, je ne l’avais jamais directement utilisé sauf pour ce cas-ci", dit-elle.
Ce mariage de la parole, de la danse et des signes surprend et séduit le public. Car les interprètes ne restent pas uniquement confinés à leur art; chacun se frotte à la spécialité de ses collègues. La critique européenne compare les mouvements fluides et doux de la chorégraphe à de la poésie virtuelle. Un commentaire qui réjouit Pascale Houbin, qui a eu l’idée du concept de Parole. "La création a beaucoup évolué depuis ses débuts, en 1999. Les mouvements, la parole et les signes ne sont plus juxtaposés, ils forment désormais un tout."
Pourtant, la création ne fut pas de tout repos. Au départ, le trio voulait travailler avec les récits populaires d’Abbi Patrix. Mais comme Levent Beskardes ne comprenait rien à l’écriture française et que le trio refusait la présence d’un interprète – "Quand il y a un interprète, on ne se regarde plus" -, ils ont abandonné l’idée pour l’emploi d’images qui exprimaient la personnalité de chacun. "Puisqu’on ne voulait pas exclure Levent du processus, on a travaillé en silence le premier mois."
Aujourd’hui, Pascale Houbin a la langue bien déliée lorsqu’il est question de son spectacle. Parole a fait le tour de la France et récolté de bonnes critiques. Le trio est également heureux de présenter son oeuvre de l’autre côté de l’Atlantique. "Ce qui est bien avec Parole, c’est qu’on réunit les publics du théâtre et de la danse. Qu’on aime ou qu’on n’aime pas, le spectacle reste fidèle à ce que nous sommes", conclut la chorégraphe.
Du 9 au 13 novembre
Au Théâtre Prospero