Martine Époque : Danse du futur
Pilier de la danse québécoise, prix Denise-Pelletier en 1994, MARTINE ÉPOQUE regarde désormais vers l’avenir et la technologie. Son dernier dada: la création d’un logiciel du traitement du geste, LIFEanimation.
Pour Martine Époque, la danse virtuelle ou la technochorégraphie – une expression de son cru – sera, dans un proche avenir, une source de bonheur pour les chorégraphes, les danseurs et le public. En attendant, il lui reste à convaincre les gens de sa communauté de la valeur artistique de la technochorégraphie. "J’ai toujours été intéressée par le multimédia, explique-t-elle avec l’accent chantant du Midi. C’est en travaillant avec un logiciel de traitement de texte que j’ai eu l’idée de concevoir un programme de traitement du geste."
Pilier de la danse québécoise, son nom n’évoque pas grand-chose pour le grand public. Pourtant, depuis son arrivée au Québec, dans les années 60, la récipiendaire du prestigieux prix Denise-Pelletier en 1994 s’est bâti une réputation de visionnaire davantage que celle d’une artiste prolifique. En 1968, elle a fondé le groupe Nouvelle Aire, lequel a servi de tremplin aux chorégraphes Édouard Lock, Ginette Laurin et Paul-André Fortier, entre autres. Elle a aussi participé à la naissance du département de danse de l’UQAM et de l’Agora de la danse. Cette dynamo qui croit au destin préfère agir à l’ombre des grandes institutions afin de préserver sa liberté.
Son dernier dada: la création d’un logiciel de traitement du geste, LIFEanimation. Au moyen d’images vidéo, le programme révèle les imperfections d’un mouvement. Il peut aussi être utile pour la conception d’une chorégraphie avec ou sans danseur virtuel. "Les chorégraphes collectionnent des cahiers de notes et des dessins à n’en plus finir, explique la technochorégraphe. Je me suis dit qu’il y avait peut-être moyen de développer un système de notation semblable à une partition de musique."
Il aura fallu plus d’une dizaine d’années pour que le logiciel LIFEanimation voie finalement le jour dans les laboratoires montréalais Digits Art et Centre TIV. Le temps pour Martine Époque de démissionner de son poste de directrice du département de danse, à l’Université du Québec à Montréal, et de mettre par la suite sur pied le Laboratoire d’applications et de recherche en technochorégraphie (Lartech). Édouard Lock demeure le seul chorégraphe attitré à faire partie de l’équipe de chercheurs. Il semblerait que la plupart des chorégraphes québécois sont encore loin d’être convaincus de la pertinence du logiciel. "Mais ça va venir", croit fermement Martine Époque.
Mona est née dans les locaux de Lartech. Cette danseuse virtuelle accompagne les 20 danseurs de Tabula Rasa, la nouvelle chorégraphie de Martine Époque à l’affiche de l’Agora de la danse, la semaine prochaine. Sorte de marionnette géante en trois dimensions, Mona exécute la même gestuelle au sol que les interprètes. "Elle incarne leur conscience et leur dit en quelque sorte: Allez, tenez-vous debout."
Présentée avec succès, au printemps dernier, à l’Agora de la danse, Tabula Rasa réunissait des étudiants du département de danse de l’UQAM. Ceux-ci ont presque tous accepté de faire partie de la reprise. Pour éviter de dédoubler l’attention du public, Mona et la troupe ne bougent jamais au même moment. "Tabula Rasa réunit deux éléments qui n’ont rien à voir ensemble mais qui se complètent bien, pense Martine Époque. Quand Mona intervient, elle est là sans être là."
Lorsqu’il est question du logiciel de traitement du geste, Martine Époque en discute avec une passion qui convaincrait les plus sceptiques. Déjà, elle imagine un festival international de danse virtuelle, une chorégraphie collective sur Internet, des conférences partout dans le monde. En attendant, le simple fait d’imaginer une prochaine chorégraphie avec un couple de danseurs virtuels lui donne le tournis. "C’est dur de vivre avec le succès parce qu’on a peur de ne pas être à la hauteur de la prochaine oeuvre."
Du 19 au 22 décembre
À l’Agora de la danse
LADMMI au Théâtre La Chapelle
Les étudiants des Ateliers de danse moderne de Montréal répètent depuis plusieurs semaines de courtes oeuvres créées par de jeunes chorégraphes de l’heure, Emanuel Jouthe, Harold Rhéaume et Julia Sasso. Pour ces derniers, voilà une belle occasion de monter une danse pour de nombreux interprètes, un projet qui coûterait autrement un bras. La directrice artistique de LADMMI, Marie-Pascale Bélanger, se prête également au jeu.
Du 13 au 16 décembre
Au Théâtre La Chapelle