Sanaviël : Filles d’aujourd’hui
Pas facile de vivre de son art lorsqu’on est jeune et inexpérimenté. Peu importe, cinq diplômées des Ateliers de danse moderne de Montréal ont décidé de former le collectif Sanaviël pour présenter un spectacle au Théâtre La Chapelle.
Leur âge joue à la fois en leur faveur et contre elles. Annie Duchesne et Geneviève Dupuis dégagent une fraîcheur, un dynamisme et une candeur typiques de la jeune vingtaine. Diplômées des Ateliers de danse moderne de Montréal, elles sont convaincues, par exemple, que le public affluera au Théâtre La Chapelle pour applaudir la première oeuvre de leur collectif. Notez, avec toute l’énergie qu’elles consacrent à discuter de La Girafe, l’autruche et les sauterelles d’Augustin, leur optimisme pourrait bien l’emporter sur le fait qu’elles ne sont pas connues.
Pas facile de vivre de son art lorsqu’on est jeune et inexpérimenté. "C’est souvent l’impasse chez les finissants en danse, expliquent-elles en choeur. Avec un peu de chance, certains deviendront apprentis pour un chorégraphe tandis que d’autres attendront pendant des mois leur premier contrat professionnel. Entre-temps, ils multiplient les petits boulots pour payer leur loyer."
Restent finalement les impatients qui, comme les deux danseuses, fondent un collectif dans l’espoir de faire évoluer les choses. Une formule populaire à en juger l’émergence récente de regroupements de jeunes diplômés issus du département de danse de l’UQAM ou de LADMMI. La plupart cherchent à se démarquer du travail de leurs aînés en suggérant une danse humoristique. Dernier en lice, Sanaviël – un recoupement des prénoms des fondatrices – réunit, outre Geneviève et Annie, Julie Marcil, Sandrine Vachon et Kelly Keenan.
Même si ces collectifs parviennent tout juste à payer leurs collaborateurs, ils gagnent en revanche à se faire remarquer par des diffuseurs et des chorégraphes. Ainsi, Emmanuel Jouthe (Carpe Diem) et Pierre Lecours (La Fabrique Rouge) mènent de front, et avec brio, des carrières de chorégraphe et d’interprète. Mais s’assurer d’un bel avenir n’est pas l’unique but des membres de Sanaviël. "On veut aussi faire partie de la communauté, être reconnues par nos pairs", souligne Annie.
Pour La Girafe, l’autruche et les sauterelles d’Augustin, les filles ont demandé aux chorégraphes Estelle Clareton, Yvonne Coutts et Sandrine Vachon de s’inspirer de l’intrigant titre de la pièce. La girafe représente la vulnérabilité et la force; l’autruche, l’idée d’en finir avec la tête dans le trou; et les sauterelles se réfèrent à une légende de gigues interdites par un curé de campagne. L’ancienne danseuse d’O Vertigo leur a ainsi créé une danse-théâtre à l’humour absurde. Une oeuvre qui exige un certain talent de comédienne. Plus cardiovasculaires, les chorégraphies d’Yvonne Coutts et de Sandrine Vachon valorisent les qualités techniques des jeunes danseuses.
Ces temps-ci, les membres de Sanaviël connaissent des semaines de 70 heures. Peu importe, car "la danse, c’est notre vie", clament-elles les yeux illuminés.
Vous savez quoi? Annie et Geneviève réussiraient à vendre un frigo à un esquimau. Employée à temps partiel dans un supermarché, Annie a convaincu son patron, qui ignore tout de la danse, de commanditer Sanaviël. "On souhaite démystifier la danse en rejoignant le plus de gens possible", concluent-elles.
Jusqu’au 21 décembre
Au Théâtre La Chapelle