Jacques Moisan : Maudite machine
Scène

Jacques Moisan : Maudite machine

Roboten Ballet est issu de la réflexion du chorégraphe JACQUES MOISAN sur l’homme et la machine. Avant même la première du spectacle, il prépare déjà la suite.

C’est en suivant un stage en chorégraphie assistée par ordinateur que Jacques Moisan a commencé à se passionner pour le rapport plus que trouble qui existe entre le corps et la machine. Résultat de cette recherche: Roboten Ballet, un spectacle multimédia qui, autour du danseur-chorégraphe, réunit la danseuse Catherine Tardif, le vidéaste Yan Breuleux et le compositeur Michel F. Côté.

"Par rapport à la danse qui se fait ici, ça se rapproche davantage de la danse-théâtre ou de la performance, précise Jacques Moisan. On a travaillé à partir d’un canevas de base hyper précis, mais les séquences demeurent improvisées, inspirées par les échantillons de mouvements ou de sensations corporelles qu’on injecte en direct. Comme font les musiciens techno, ou encore ceux qui scratchent."

Une démarche qui, en danse, fait preuve d’originalité. "Ici, à Montréal, en théâtre et en arts visuels, on improvise depuis longtemps; mais en danse, à part ce qu’on observe dans le travail de Benoît Lachambre, c’est tout de même assez nouveau. C’est une façon de travailler où l’interprète propose beaucoup plus. On voit donc émerger des chorégraphies moins écrites", ajoute Moisan avec un mélange de fierté et d’ardeur qui tient plus de l’enthousiasme que de la moindre prétention.

Le jeune chorégraphe a donc créé avec des logiciels et des robots virtuels, préoccupé bien sûr par la déshumanisation de la machine, mais fasciné par le corps-objet. "On s’en va vraiment vers les robots, on se fait happer par la technologie et la génétique. C’est terrifiant. Ne serait-ce que dans le rapport danseur-chorégraphe, il y a quelque chose de la machine, puisqu’on est là pour exécuter une tâche. Moi, j’ai voulu travailler le corps-objet avec humour. Je mets le corps dans des situations tellement grosses, évidentes, que de voir ainsi nos dysfonctions, ça peut faire rire."

Le travail avec ordinateur a amené Moisan à développer un langage corporel difficile à décrire, mais dont certains aspects peuvent déjà chatouiller notre curiosité. "Ce qui m’a frappé avec un des logiciels que j’ai utilisés, c’est la malléabilité des doigts. Si on prend le temps d’animer une main, elle devient quasi humaine, même si on sait très bien que c’est une image. C’est avec cette idée qu’on a travaillé en studio, à partir des doigts. Une danse qui part des doigts pour se diriger partout à travers le corps. Ça donne une gestuelle un peu étrange, extrême."

Pour Jacques Moisan, Roboten Ballet est l’occasion de renouer avec Catherine Tardif et Michel F. Côté, avec qui il a travaillé il y a deux ans, sur le spectacle Trinité (ou quand t’es né pour un p’tit pain). Douces retrouvailles. "J’aime ça, me retrouver avec les mêmes gens. Ça peut être long pour moi de créer des rapports d’intimité. Avec eux, je me sens bien, ils me comprennent et j’apprécie énormément toutes leurs propositions."

Roboten Ballet est la première oeuvre issue de la réflexion du chorégraphe sur l’homme et la machine. C’est le début d’une série, et déjà Jacques Moisan prépare la suite. "La thématique est tellement forte! La prochaine pièce, probablement intitulée Slut Machine, traitera de la sexualité sur Internet… J’ai très envie d’aller cette fois vers la vidéo, ou même le film."

Du 24 au 27 janvier
À Tangente