Lévesque-Turcotte : Drôle de couple
Scène

Lévesque-Turcotte : Drôle de couple

Pour son quatrième spectacle, le tandem Lévesque-Turcotte poursuit sa fusion entre humour et théâtre. Quatorze personnages, bien connus comme Dany Verveine ou nouvellement arrivés, défilent ainsi dans un univers quasi  high-tech.

Déjà, à l’époque où Dominique Lévesque et Dany Turcotte oeuvraient au sein du Groupe Sanguin, leur humour occupait une case à part: utilisation de black lites et d’ombres chinoises, mise en scène assurée par Robert Lepage, la bande du Saguenay-Lac-Saint-Jean avait su développer un style qui lui était propre.

Au cours de leurs 10 années passées en tandem, les deux compères ont su conserver leur spécificité. Pour eux, pas question de jouer les Abbott et Costello ou d’empiéter sur le territoire des stand-up. "Toutes les cases humoristiques étant prises, tu trouves ton créneau par la force des choses, indique Dominique Lévesque. On avait commencé dans le Groupe Sanguin à être plus visuels, avec un esprit carabin. On a gardé ça dans nos shows à deux et on a intégré un peu de critique sociale."

"On s’est aperçus aussi que ce n’était pas la même dynamique dans le Groupe Sanguin et dans Lévesque-Turcotte, poursuit-il. Qu’on ne pouvait pas jouer souvent ensemble, que c’était plus compliqué parce qu’il y avait des longueurs et que nos forces étaient individuelles. Peut-être qu’on n’a pas encore trouvé la mécanique du faire-valoir et du "clencheur"…"

Sous observation
Le plus récent spectacle du duo, Sous observation, roule depuis l’été dernier. Cette fois encore, les deux complices ont tenu à offrir un spectacle visuel, misant beaucoup sur l’apport du multimédia: projection sur des objets en trois dimensions, interaction entre les deux humoristes et leurs projections, etc. "Tant qu’à faire un show, on essaie de le faire le plus complet possible, le plus visuellement intéressant, indique Lévesque. On n’a jamais aimé qu’un décor soit là simplement pour éviter que la scène soit vide, car après cinq minutes, on l’oublie. On a toujours essayé de changer la sémantique, la définition de nos décors."

À cet apport scénique se sont ajoutés des textes aux thématiques fortement ancrées dans l’actualité. Problème des joueurs compulsifs, vieillissement de la population, tests de médicaments – qui nous vaut un numéro complètement délirant de la part de Lévesque -, les deux compères se sont visiblement plu à mettre la société sous observation et à amplifier ses travers. "Le premier but d’un show d’humour est le divertissement, il faut qu’on s’amuse comme dans un tour de manège, croit Dany Turcotte. Si on passe trop de messages, ça déplaît aux gens. Mais je pense qu’on a réussi une espèce de dosage entre la critique sociale et l’humour pour l’humour."

Chacun des thèmes à saveur sociale est traité avec une certaine prudence par le duo. Que ce soit par le biais de nouveaux personnages comme le délirant vendeur de la Société des drogues – espèce de succursale de la SAQ où l’on vent des drogues douces – ou d’anciens comme le méprisant millionnaire Robert Bouvier-Bernois, qui permet de traiter du fossé qui sépare les riches des pauvres, Lévesque et Turcotte préfèrent tendre des perches à leur public plutôt que de donner dans un humour engagé, extrême ou didactique. "Les temps ont changé, explique Dominique Lévesque. Même Deschamps ne pourrait plus être critique comme il l’était avant. C’est certain qu’on est un peu prisonniers de notre image, de notre public et de notre marché – parce que c’est un marché et une entreprise. Notre fantasme aurait été de faire, pour un soir seulement, un show d’humour extrême avec d’autres humoristes. On voulait faire par exemple un numéro où j’interviewais un Français qui abusait des petites adolescentes pré-pubères à Euro-Disney. Le sketch est écrit, mais on n’oserait jamais le présenter à notre public."

L’inséparable duo
Bien qu’avoisinant déjà les 100 représentations, Sous observation n’est encore qu’au tiers, voire au quart de sa route. Le tandem s’attend en effet à offrir plus de 300 représentations du spectacle. Pas mal pour un groupe qui songeait à se séparer il n’y a pas si longtemps… "C’était moi qui branlais dans le manche, raconte Lévesque. À l’époque, j’avais beaucoup le trac et je voulais passer plus de temps avec ma famille et mes enfants. Ce sont deux affaires qui ont changé au cours de la dernière année et demie de notre ancien show . Premièrement, je me suis séparé, ensuite je me suis rendu compte que j’apprivoisais mieux le trac. On dirait qu’à force d’en parler, dans les médias ou ailleurs, c’est devenu beaucoup plus supportable. Ç’a été une espèce de thérapie publique qui m’a permis de remonter sur les planches avec plus de plaisir que jamais…"

Même si tout semble au beau fixe pour le tandem, l’avenir demeure incertain. Certes, quelques projets sont dans l’air, notamment du côté télévisuel, mais rien n’est officiel, si ce n’est la tournée. "Maintenant, je ne me prononce plus sur l’avenir du groupe, rigole Dominique Lévesque. S’il y a un autre show, tant mieux, s’il n’y en a pas, tant pis!"

Les 7, 8 et 9 février

À la salle Albert-Rousseau
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