L'Aberration des traces : Pièce à sensations
Scène

L’Aberration des traces : Pièce à sensations

L’Aberration des traces est sans conteste le spectacle de danse le plus atypique de la saison. Artiste de la déstabilisation et de la déconstruction, BENOÎT LACHAMBRE fait dans la performance.

L’Aberration des traces

part d’un rêve qu’a fait Benoît Lachambre à la suite de la mort de son père. Des phrases du roman La Disparition de Georges Pérec ponctuent l’installation Somnolence de Julie Andrée T. Poitras à l’intérieur de laquelle les spectateurs prennent place à leur guise. Les trois danseuses improvisent au travers de ces éléments de décor: un mur, des cordes tendues… Le parcours qu’elles ont à y accomplir constitue leur seul point de repère. "Normalement, c’est le mouvement qui est placé, mais avec Benoît, c’est la scénographie", explique la danseuse Diane Leduc, en l’absence du chorégraphe, qui se trouve présentement en Europe, où il a d’ailleurs été reconnu avant de l’être dans sa propre ville, Montréal.

Avant de travailler sur Dédanse d’elles avec Benoît Lachambre il y a quatre ans, Diane Leduc n’avait jamais vu ses oeuvres. Drôle de bonhomme, a-t-elle alors pensé. "Au début, c’est très insécurisant. C’est quelqu’un qui a l’air un peu perdu. Comme il voyage beaucoup, parce qu’il est très en demande maintenant, on se voit pour des petits blocs d’un mois. On travaille plein de trucs, puis il part pour six mois. Avec Dédanse d’elles, je me disais: on n’arrivera jamais… Mais il finit par finir. Il est capable de tout ramasser en une répétition. Il sait où il s’en va, mais il ne le dit pas tout le temps… J’ai appris à ne pas m’inquiéter." Et elle a aussi pris goût à ce genre de danse.

Par l’improvisation, Benoît Lachambre cherche à retrouver le "geste cru" sans aucun souci de l’esthétique. Si d’autres danseurs s’intéressent à l’émotion, lui se passionne plutôt pour la sensation du mouvement. "Le but, ce n’est pas de faire les mêmes mouvements que lui, insiste la danseuse, mais de trouver la même sensation, sinon ça ne marche pas. Il nous guide pendant qu’on improvise: continue, relâche la tête, relâche les hanches, laisse-toi tomber, change le rythme… C’est comme un leitmotiv. Il y a des shows où je suis plus nerveuse et ça arrive que je me raccroche à ça comme à une chanson." Comme elle est présentement enceinte jusqu’aux oreilles, le chorégraphe l’a fait travailler dans le sens d’un confort absolu. Il a aussi éliminé toute l’agressivité que pouvait contenir la pièce à sa création, il y a deux ans.

Chaque représentation de L’Aberration des traces est unique. Le comportement du public, qui en général apprécie l’expérience, influence fortement la prestation des interprètes. "On se voit et il y a des attouchements des fois, mais il n’y a rien de provocateur", précise Diane Leduc. Au lieu d’être stressée par cette proximité, la danseuse se sent au contraire plus calme. "Ça nous force à ne pas être totalement absorbées par ce qu’on fait, mais à être bien ouvertes sur ce qui se passe, dit-elle. C’est tellement plus satisfaisant. Pour moi, c’est comme ça qu’on touche les gens, pas en leur montrant un exploit. C’est en étant vraiment sincère dans la recherche de sensation."

Du 27 février au 2 mars

Au Studio In vitro
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