Ladies’ Night : La chair est triste
La chair est triste et, hélas, le peuple en redemande.
La chair est triste et, hélas, le peuple en redemande. À la télé, au cinéma, en humour, dans les magazines… le sexe est partout. De Je regarde, moi non plus à Québec érotique, il se trouve en ce pays quelques bonnes âmes pour exploiter ce créneau jadis à l’index. Évolution des moeurs? Les Québécois ne sont plus nés pour un p’tit pain, mais pour une p’tite vite!
Dernier en lice, Ladies’ Night, ou comment cinq chômeurs ringards se transforment en danseurs nus pour faire un coup d’argent. La pièce à l’affiche du magnifique Théâtre Corona est une adaptation québécoise de la comédie néo-zélandaise à succès – et non du film The Full Monty. Traduite et mise en scène par Denis Bouchard, Ladies’ Night est défendue par Serge Postigo, Sylvie Boucher, Michel Charrette, François Chénier, Marcel Leboeuf, Didier Lucien et Martin Petit.
Est-ce que c’est drôle? Par moments. Est-ce que c’est vulgaire? Un peu. Est-ce que ça va marcher? Oh oui, énormément! Voit-on leur pénis? Ne vendons pas le punch… Est-ce que c’est bon? Oui et non.
En fait, Ladies’ Night est un bon show de variétés mais pas du bon théâtre. Car, avec son histoire très mince et sa morale vite expédiée (les hommes doivent s’accepter tels qu’ils sont sans avoir peur de se montrer avec leurs défauts et leur vulnérabilité), la pièce ne repose pas sur des ressorts dramatiques solides. Les personnages forment une galerie archétypale de pauvres mecs machos, loosers, bornés, sexistes et homophobes.
Reste qu’après un long départ (il y a un problème de rythme au début), le public embarque et en redemande. Il faut dire que les cinq interprètes des apprentis Chippendales sont excellents. Mentionnons l’incroyable nerd de Marcel Leboeuf; et le Gino à la coupe Longueuil défendu avec beaucoup d’efficacité par le talentueux Serge Postigo (la scène où il se caresse est pissante). Mais la révélation de Ladies’ Night, c’est la performance du jeune François Chénier. Son numéro de travelo le pousse aux limites de la pudeur, voire du ridicule. Or, le comédien reste en contrôle et évite le cabotinage.
Malgré ses qualités, le spectacle souffre d’un manque de raffinement (et ce n’est sûrement pas parce que Zone 3, le producteur, manquent de moyens, pardi!). Les décors, les costumes, les éclairages et la bande sonore font très théâtre d’été. Et encore, j’ai déjà vu du théâtre en région dont la facture scénique était moins cheap.
Au-delà du look, il y a la vision; parce qu’il y a des artistes autour de ce projet. Si le film britannique explorait davantage le microcosme social de ces ouvriers en chômage, la pièce démontre seulement une chose: ils sont épais en maudit, nos boys! Et c’est justement mon problème avec ce genre de comédie très premier degré, nivelée par le bas: ça me déprime!
Je sais: en humour, tout le monde aime rire de pire que soi; mais il y a des limites.
Jusqu’au 10 mars
Au Théâtre Corona