Violette sur la terre : Psychologie des profondeurs
Scène

Violette sur la terre : Psychologie des profondeurs

Formée en interprétation, CAROLE FRÉCHETTE a parcouru un "long chemin vers l’écriture". "À l’issue d’un grand détour par la création collective, explique l’auteure, j’ai compris qu’au fond, j’aime mieux écrire que jouer; en fait, c’est ça que je sais faire…"

"Avec le recul, je me rappelle que j’ai toujours été préoccupée par le sens. Et le lieu premier du sens, c’est le texte. On crée un monde que feront vivre d’autres êtres humains, qui passera par d’autres filtres. Cette chaîne-là, c’est très beau; c’est à la fois convivial et artisanal."

Carole Fréchette semble comblée par l’écriture dramatique, travail à la fois exigeant et fascinant, notamment parce qu’il oblige "à une concision extrême". Appréciées au Québec, ses pièces sont également jouées dans différents pays, et traduites en plusieurs langues: anglais, espagnol, roumain; récemment, en allemand et bientôt, en arabe. Entendre sa propre pièce jouée dans une autre langue est, confie-t-elle, "une drôle d’expérience. On reconnaît bien sûr la pièce, mais on ne comprend pas les mots. On se laisse juste bercer par la musique de cette langue: sentiment d’étrangeté très agréable."

C’est en réponse à une commande que Carole Fréchette écrit la pièce Violette sur la terre. Désireux de créer un spectacle sur l’univers des mines, les directeurs artistiques de trois compagnies situées dans des régions minières – le Théâtre du Nouvel-Ontario (Sudbury), le Théâtre du Tandem (Rouyn-Noranda) et le Théâtre en Scène (Nord-Pas-de-Calais, France) – font appel à elle. "J’ai d’abord été réticente. Moi, je suis née à Montréal: je ne connaissais ni les mines, ni le nord, ni les régions éloignées. Ils ont insisté, disant qu’ils voulaient justement un regard étranger, un regard de femme sur un monde masculin. Je n’avais pas envie de faire du théâtre engagé, documentaire. Ils me donnaient toute liberté; ils ont fini par me convaincre."

Une première phase mène l’auteure à "s’imprégner de cet univers-là". Elle rencontre des mineurs et leur famille, elle visite des mines. "Je suis surtout allée à la rencontre d’êtres humains, hommes et femmes, dont les témoignages sont des récits de vie plus que des trucs reliés au travail à la mine. Ces gens m’ont beaucoup touchée."

"J’ai découvert trois milieux très différents. Mais certaines choses m’ont frappée: c’est un métier dur et dangereux, inquiétant, un métier d’hommes. Le monde des mines est un monde très fragilisé, aussi, qui appartient surtout au passé. J’ai été très vite fascinée, de plus, par le côté métaphorique de la descente dans les profondeurs de la terre. J’ai écrit aussi une pièce qui descend dans les profondeurs des gens."

Outre les rencontres, "j’ai été impressionnée par les paysages tristes et dévastés, que j’ai retrouvés, pareils, aux trois endroits". Ce sera le point de départ de l’écriture: "J’ai d’abord imaginé un paysage: une mine abandonnée. Tout à coup j’ai vu une femme: qui est-elle? Au début, j’avais l’impression que Violette serait le centre de la pièce. Mais les personnages apparaissaient, et projetaient sur elle leur histoire." Violette, dans son mystère, agit comme un "révélateur"; et la pièce parle, surtout, des personnages qui la rencontrent, marqués par le "côté désertique du lieu où ils vivent".

Mise en scène par le Français Vincent Goethals, la pièce réunit des concepteurs québécois et des comédiens franco-ontariens. Après Sudbury, Ville-Marie, Rouyn-Noranda et Québec, où pour la première fois est jouée une pièce de Carole Fréchette, l’équipe s’envole en mars vers la France, avant de revenir au Québec l’automne prochain.

Jusqu’au 2 mars

Au Théâtre Périscope
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