Les Gymnastes de l'émotion : Culture physique
Scène

Les Gymnastes de l’émotion : Culture physique

Dans Les Gymnastes de l’émotion, Gabriel Sabourin et Louis Champagne s’amusent comme des enfants autour du Paradoxe sur le comédien, dialogue du penseur Denis Diderot. Les deux auteurs, metteurs en scène et acteurs offrent leur performance imaginative et déroutante, véritable jeu d’adresse qui permet de se pencher, entre deux éclats de rire, sur une grande question: le bon comédien est-il un être sensible guidé par ses émotions, ou un observateur maîtrisant parfaitement son art?

C’est souvent dans les caves et les gymnases que se prépare la relève, les mains plongées dans un coffre de vieux vêtements. Dans Les Gymnastes de l’émotion, Gabriel Sabourin et Louis Champagne s’amusent comme des enfants autour du Paradoxe sur le comédien, dialogue du penseur Denis Diderot. Leur sous-sol, c’est une magnifique et intrigante salle du Temple maçonnique de Montréal, où ils ont installé un gymnase de poche. C’est là que les deux auteurs, metteurs en scène et acteurs offrent leur performance imaginative et déroutante, véritable jeu d’adresse qui permet de se pencher, entre deux éclats de rire, sur une grande question: le bon comédien est-il un être sensible guidé par ses émotions, ou un observateur maîtrisant parfaitement son art?

Monsieur de Sabrecour (Gabriel Sabourin, excellent), critique de théâtre acerbe, s’amuse à insulter sa bonne révolutionnaire (Geneviève Rioux, dans un rôle ingrat) en attendant qu’arrive un artiste invité à discuter théâtre au-dessus d’un bon repas. À sa place se pointe le nouveau cuisinier (Louis Champagne, irrésistible quand il enfile son collant de gymnastique!), qui est en fait un auteur, Monsieur du Mousseux, bien décidé à lui faire ravaler un papier assassin. La soirée prend une tournure encore plus inusitée quand le critique dévoile au dramaturge sa "tourterelle" (Stéphane Brulotte, attendrissant), une bête capable de jouer à la perfection des milliers de textes. Un Frankenstein du théâtre, créé dans un gymnase. Tous trois se livreront alors à une série d’exercices plutôt saugrenus…

Durant deux heures, les flashs amusants se multiplient. Mais les accessoires inusités et, surtout, la romance (du Mousseux aime la soubrette qui, elle, est éprise de la Bête) portent ombrage au duel intellectuel. Sabourin et Champagne ont brodé autour du paradoxe de Diderot sans le pousser plus loin, en se gardant bien de trancher la question. Ils auraient pu opter pour un show dépouillé, avec discussion autour d’une table comme l’avaient fait Jean-Pierre Ronfard et Robert Gravel dans le percutant Tête à tête. Ils ont préféré un événement éclaté, décousu mais traversé d’un plaisir contagieux. Libre à eux.

"La critique construit", affirme avec fierté de Sabrecour.

"La critique est un spectacle qui se fait sur le dos de l’artiste", réfute du Mousseux.

Par des déclarations de la sorte, cette création ouvre la porte à de précieuses réflexions chez tous ceux qui s’intéressent au jeu des "sublimes imitateurs de la nature" que sont les comédiens… peu importe ce qu’ils pensent de la critique!

Jusqu’au 9 mars
Au Temple maçonnique de Montréal