Carole Fréchette : Un homme et une femme
Scène

Carole Fréchette : Un homme et une femme

Ce mois-ci, pas moins de quatre femmes verront une de leurs pièces être créée dans un théâtre montréalais. Parmi elles, CAROLE FRÉCHETTE, qui se consacre à l’écriture dramatique depuis plus de 10 ans, et qui voit enfin ses textes reconnus ici et à l’étranger. Avec Jean et Béatrice, elle signe un drôle de duel entre un homme et une femme à la recherche de  l’amour.

Carole Fréchette

est contente mais épuisée. Son théâtre circule de plus en plus: Syrie, Liban, Mexique, France, Belgique, Allemagne… En 18 mois, l’auteure a finalisé quatre textes dont trois seront créés cette année au Québec et à l’étranger. Sans parler de la reprise de ses pièces précédentes, dont Les Sept Jours de Simon Labrosse, mise en scène par Romane Bohringer, qui a tenu l’affiche 10 mois à Paris l’an dernier. "Il y a des productions qui roulent tout le temps."

La pièce qui retient notre attention aujourd’hui, c’est Jean et Béatrice, qu’elle avait amorcée il y a deux ans, puis abandonnée avant qu’un metteur en scène mexicain, Mauricio García Lozano, ne la relance avec ce projet. Finalement, Jean et Béatrice prendra l’affiche du Théâtre d’Aujourd’hui le 12 mars, avec Marie-France Lambert et Normand D’Amour. Pour porter l’oeuvre à la scène, Carole Fréchette a proposé le metteur en scène mexicain, qui n’avait jamais travaillé au Québec, à René Richard Cyr. Surpris, le directeur artistique du Théâtre d’Aujourd’hui a tout de même accepté. La production dirigée par Mauricio García Lozano ira aussi cet été au Mexique, mais avec une distribution mexicaine.

Simon Labrosse, Le Collier d’Hélène, Violette sur la terre, Les Quatre Morts de Marie, et Jean et Béatrice. Presque tous les titres des pièces de Carole Fréchette contiennent des prénoms! "Au début, je faisais ça spontanément, dit-elle. Peut-être parce que je rentre dans une pièce par le biais d’un personnage. Je trouve que les humains sont au centre du théâtre. Le théâtre est le lieu des contradictions de l’être humain. Je n’écris pas du théâtre qui se passe dans des lieux multiples. Je choisis un lieu et deux ou trois moments cruciaux dans la vie de un ou deux personnages principaux."

Pour Jean et Béatrice, un homme et une femme se rencontrent pour la première fois dans un appartement au 33e étage d’un immeuble situé dans une grande ville. La femme a posé des affiches sur les murs de la ville, promettant une récompense substantielle à quiconque "pourra l’intéresser, l’émouvoir et la séduire. Dans cet ordre". Un homme se présente au début, prêt à accomplir la tâche et repartir avec une bonne somme d’argent. Alors commence un fascinant jeu de l’amour et du hasard.

"À partir de La Peau d’Élisa, j’avais le sentiment que les personnages principaux de mes pièces étaient très solitaires, explique Carole Fréchette. Sur leur chemin, ils croisaient d’autres personnages mais il n’y avait jamais de vraie rencontre. J’ai donc décidé de provoquer une rencontre entre deux solitudes. Mais je ne voulais pas écrire une pièce sur le thème de l’engagement amoureux. Alors j’ai décidé de prendre un homme et une femme et de les mettre dans une pièce fermée à clé. J’ai jeté la clé… et advienne que pourra! Et j’ai découvert qu’il y avait 1000 façons de ne pas se rencontrer, même dans une pièce fermée à clé (rires)."

Jean et Béatrice est une pièce sur la recherche de l’amour mais aussi sur la peur de l’amour. "Elle est construite sur un parcours où plus on avance, plus on découvre des choses, plus les masques tombent. Il y a encore des choses qui m’échappent dans cette pièce. Mais je pense que ça parle beaucoup de nos idéaux face à l’amour, de tous les clichés que le monde nous déverse à propos de l’amour.

"C’est ma pièce qui a été la plus difficile à écrire, poursuit la dramaturge. Je voulais forcer une rencontre, un happy end. Et ça ne marchait jamais avec la situation que je décrivais au départ. J’ai mis ma pièce en pénitence dans le tiroir pendant deux ans. Quand je l’ai reprise, je suis allée au bout de la machine que j’avais mise en place: un huis clos, avec deux personnages, trois épreuves et un rapport de marchandage entre un homme et une femme. En cours d’écriture, je me demandais: "Pourquoi je fais ça? Ce n’est pas ce que je pense de l’amour." Je voulais écrire une pièce sur la rencontre d’un homme et d’une femme. Finalement, j’ai écrit une pièce sur la difficulté de se rencontrer. Parce que l’amour est peut-être une fabulation. Un jeu."

Comme le théâtre.

Du 12 mars au 6 avril
Au Théâtre d’Aujourd’hui