Maxime Denommée : L'ange noir
Scène

Maxime Denommée : L’ange noir

Pour son troisième rendez-vous en trois ans à La Licorne, le comédien MAXIME DENOMMÉE nous convie à explorer un univers urbain et violent dans lequel l’honneur et la vengeance s’entremêlent. Une production coup de poing du Théâtre de La  Manufacture.

Un visage d’ange. Maxime Denommée a un visage angélique. Pourtant, ce comédien de 26 ans a défendu surtout des rôles de jeunes hommes enragés qui exaltent un parfum de révolte: le prostitué fugueur de L’Hôtel des horizons; le soldat violeur du Monument; le paraplégique de Quadra; et le troublé Mike dans Trick or Treat, rôle qui, en 1999, nous l’a fait connaître.

"J’ai fait mon premier jeune premier avec L’Avare, l’automne dernier, explique Maxime Denommée. Au Conservatoire, j’étais toujours choisi pour défendre des jeunes premiers. À ma sortie, on m’a plutôt confié des révoltés. J’étais surpris mais content. Le contraste est intéressant et inattendu entre ma gueule et la violence intérieure de ces personnages."

Son prochain rôle, dans la pièce de l’Irlandais Mark O’Rowe, Howie le Rookie, ne fait pas exception à la règle. Le directeur du Théâtre de La Manufacture, Jean-Denis Leduc, a vu la pièce à Dublin, il y a deux ans. Il n’a pas tout compris à cause de l’accent, mais il a senti qu’il se passait quelque chose de particulier avec ce texte très dur. Il a fait traduire la pièce par l’auteur Olivier Choinière puis a demandé au metteur en scène Fernand Rainville de monter le texte avec Denommée et Claude Despins; deux comédiens qui ont fait partie de la distribution de Trick or Treat de Jean-Marc Dalpé, que La Manufacture a produit avec succès en 1999 (plus d’une cinquantaine de fois en tournée et une adaptation pour la télé).

Howie le Rookie est une histoire de dette, de gale, de bagarre et de règlements de comptes dans les bas-fonds de Dublin; une affaire de matelas contaminé par la gale qui entraîne Howie Lee dans une vendetta lancée contre le Rookie. Mais c’est aussi une histoire d’entraide, de rédemption et d’amitié; Rookie sera finalement défendu par Howie, son ennemi de la veille…

"Ces personnages parlent la langue de la rue, explique le comédien. Mais, bien qu’ils soient dans la merde, on sent qu’ils ont une conscience, une intelligence, une profondeur. Malgré la dureté, je ne les trouve pas misérables. C’est pas compliqué pour eux: on te poursuit, tu te sauves; si tu attrapes quelqu’un, tu lui casses la gueule dans une ruelle. C’est la loi de la jungle.

"L’écriture de Mark O’Rowe est très incarné, poursuit-il. Tout se passe dans le moment présent. On revit les événements en les racontant." Car il s’agit de deux monologues joués successivement par Howie Lee (Despins) et Rookie Lee (Denommée). Ce sera donc une exigeante performance pour ces deux acteurs qui devront livrer seulement avec les mots et leur talent l’univers dur et cru de Mark O’Rowe.

Timide, réservé, voire sauvage, Maxime Denommée a eu une enfance loin de la scène. Fils de fermier, établi près de Farhnam, il vient d’un monde où les hommes n’expriment pas beaucoup leurs émotions. À l’école, il découvre qu’il a le don de capter l’attention des gens en public. "Sur scène, je peux sortir ce qui bouillonne à l’intérieur de moi mais que je n’extériorise pas dans la vie de tous les jours", dit-il.

Après le Conservatoire, les portes se sont ouvertes naturellement: "Je suis chanceux. On m’a offert des beaux rôles. Ça n’a jamais été compliqué. Mais en même temps, je vois ce métier simplement. Je n’angoisse pas à l’idée de manquer de travail. Si jamais je n’ai plus de rôle, je n’attendrai pas chez moi à côté du téléphone. Je sais que je peux faire autre chose avec mes deux mains: de la plomberie, de la peinture, des meubles, n’importe quoi!"

Toutefois, Maxime Denommée n’aura pas besoin de prendre un contrat de peinture tout de suite. Après Howie le Rookie, il fera partie de la prochaine saison de La Licorne pour la création de Cheech de François Létourneau. Mise en lecture au Festival annuel d’innovation théâtrale de L’Assomption, l’an dernier, la pièce sera portée à la scène par Frédéric Blanchette avec, outre Denommée, Kathleen Fortin, Fanny Mallette, Maxim Gaudette et Patrice Robitaille.

"Pendant la diffusion de Quadra, j’ai réalisé l’énorme pouvoir de la télé. Du jour au lendemain, je signais des autographes. C’est enivrant de réaliser qu’on a la chance de toucher du monde avec ce métier. Mais il ne faut pas croire qu’on est meilleur que les autres pour autant. Un acteur peut facilement abuser de ce pouvoir-là, se prendre au sérieux. Moi, j’espère de toujours rester simple…

"Quand j’étudiais au Cégep de Saint-Laurent, j’étais allé voir Jean-Louis Millette dans Fin de partie de Beckett. Après la représentation, je me suis rendu dans sa loge pour lui dire que j’avais déjà joué le même personnage, Clov, dans une production étudiante. Et il a été d’une grande gentillesse, d’une grande générosité." Comme quoi les plus grands acteurs sont souvent les plus simples.

Du 19 mars au 27 avril
Au Théâtre La Licorne