Far West : Indiens dans la ville
Scène

Far West : Indiens dans la ville

Il y a peut-être plus de similitudes qu’on ne le croit entre un bar de Sept-Îles et un saloon du Far West. C’est ce que l’auteure Emmanuelle Roy démontre dans sa plus récente création, sorte de croisement entre une tragédie grecque et un western spaghetti où des femmes s’affrontent en trinquant, à coups de phrases tranchantes comme des couteaux.

Il y a peut-être plus de similitudes qu’on ne le croit entre un bar de Sept-Îles et un saloon du Far West. C’est ce que l’auteure Emmanuelle Roy démontre dans sa plus récente création, sorte de croisement entre une tragédie grecque et un western spaghetti où des femmes s’affrontent en trinquant, à coups de phrases tranchantes comme des couteaux. Il était une fois dans l’Est une bande de désoeuvrées à la peau cuivrée, plus mortes que vivantes, tirées de leur torpeur par le retour d’une métisse du coin en pleine crise existentielle. Serveuse, s’il vous plaît, de l’eau-de-vie et des explications, ça presse!

Ce n’est pas un hasard si l’action de Far West se déroule à Sept-Îles. La dramaturge y a grandi et a choisi d’y revenir, après des études à Montréal; c’est d’ailleurs là qu’a été créée cette production du Théâtre Face Public, le mois dernier. Intriguée par les Amérindiens des environs, avec qui elle déplore avoir eu bien peu de contacts durant son enfance, Emmanuelle Roy a choisi de se pencher sur les difficiles relations entre ses concitoyens et les Premières nations. De gratter un peu la plaie, en lâchant dans un bar, comme dans un ring, des personnages bien décidés à "faire sortir le méchant".

Dommage toutefois que le combat mis en scène par Josée Roussy soit trop chargé et inutilement alambiqué. Roy a voulu écrire un mythe moderne, une tragédie autochtone sur l’identité. Elle n’a pas lésiné sur les fantômes (prisonniers du sous-sol!), envolées lyriques, symboles, références et sens cachés. Certains interprètes s’en sortent bien (pétillante Nathalie Briard, irrésistible Véronique Pinette), d’autres (Virginie Dubois, Diane Ouimet) versent dans la caricature de tragédienne, figées et sans nuance, bloquées à la puissance 10 jusqu’au salut final. De plus, les accents que se fabriquent les comédiens distraient plus qu’autre chose, particulièrement celui, Sagouine sur les bords, de Tania Kontoyanni. Heureusement que le musicien et bruiteur André Barnard, installé dans une fosse au milieu de la scène, vient mettre de l’ambiance et de la fantaisie dans cette virée mélodramatique au cabaret L’Élysée.

L’exercice est plus ou moins concluant, mais ce pont cahoteux tendu en direction de Sept-Îles a le mérite de faire réfléchir sur la place des hommes et des femmes (cow-girls ou Indiennes, peu importe) dans la société. Juste pour cela, le voyage n’aura pas été inutile…

Jusqu’au 30 mars
Au Théâtre Prospero