Rennie Harris : La célébration
Scène

Rennie Harris : La célébration

Les spectacles de danse hip-hop, à Montréal, ne sont pas légion. Le passage chez nous, pour la toute première fois, du Rennie Harris Puremovement (un chorégraphe comparé à Alvin Ailey et Bob Fosse), constitue donc un événement, à tout le moins, une séduisante curiosité.

Allons-nous assister, à la très sérieuse salle Pierre-Mercure, à une musclée mais gentille démonstration de break-dancing pour les nostalgiques de Dubmatique? Il semble que non. Sur papier, en tout cas, l’aventure de du Rennie Harris Puremovement est nettement plus corsée. Pas de break-dancing sur scène, mais un savant et vigoureux mélange de B-Boying, house et stepping, mélange auquel les 12 danseurs de la troupe intègrent des éléments de tradition africaine, antillaise et brésilienne.

Les extraits des critiques parvenues jusqu’à nous annoncent un spectacle enlevant et parfaitement maîtrisé. "Ces athlètes de Philadelphie transcendent les racines populaires pour donner à cette danse une forme théâtrale stupéfiante", peut-on lire dans le Village Voice.

Fondée par Rennie Harris il y a maintenant 10 ans, la compagnie s’est donné pour mission de préserver et propager la culture hip-hop dans ce qu’elle a de plus authentique, au-delà des modes et des courants. Ainsi, parallèlement aux spectacles de danse qu’il conçoit, dirige et promène avec succès aux États-Unis comme en Europe, Rennie Harris organise à Philadelphie, sa ville natale, des cours, des stages, des ateliers de danse, et propose même des conférences sur l’histoire du hip-hop. Son cheval de bataille consiste à combattre les préjugés entourant le hip-hop.

"Les stéréotypes véhiculés, surtout par la télévision, sont nettement exagérés, explique Harris. En danse, ce qui est intéressant avec le hip-hop, c’est la structure, la fondation, qui sont beaucoup plus solide que l’on pense… Aujourd’hui, ça s’est perdu. Les jeunes qui commencent à danser veulent apprendre des "trucs" tout de suite, pour faire de l’effet, épater leurs amis; mais nous, avec la compagnie, on essaie de leur enseigner cette base, parce qu’on veut partager quelque chose, y compris le respect qu’on a pour ceux qui ont lancé le mouvement. On veut rappeler aux gens que ce qu’ils ont vu à la télévision, ce n’est pas du pur hip-hop; c’est souvent récupéré, parfois ça s’est même intellectualisé alors que le hip-hop, à l’origine, ce n’est qu’une chose: la célébration."

Le chorégraphe, qui enseigne depuis l’âge de 14 ans, n’est pas né de la dernière pluie et a travaillé auprès d’artistes reconnus, dont Run DMC, Kool Moe Doe et Salt ‘n’ Pepa. Avec le spectacle Rome and Jewels, il a remporté trois Bessie Award, et après l’avoir comparé à Alvin Ailey et Bob Fosse, on l’a récemment désigné comme étant l’une des personnalités les plus marquantes des 100 dernières années de l’histoire de Philadelphie.

Le spectacle que nous verrons à Montréal (juste avant Québec, Ottawa et… Brooklyn) s’intitule Répertoire. Sur des musiques de P-Funk, Groove Collective, Dru Minyard (mixées, réécrites et compilées), il s’agit d’un programme de cinq pièces dansées par des hommes seulement. Comme on reproche souvent au mouvement hip-hop d’être plutôt macho, signalons que le Rennie Harris Puremovement compte trois danseuses, qui

ne seront pas du voyage, occupées avec la seconde troupe de la compagnie. Pour le reste, la grande question concerne le public visé par un tel spectacle. Les amateurs de danse, généralement curieux et friands de nouvelles énergies, se déplaceront sans doute. Mais ceux qui, ici, se réclament de l’esprit hip-hop, beaucoup plus jeunes et plus marginaux, feront-ils le détour par le Centre Pierre-Péladeau? Passons le mot. Leur opinion nous intéresse…

25, 26 et 27 avril
Salle Pierre-Mercure du Centre Pierre-Péladeau