Kmùkamch l’Asierindien : Suivez le guide!
La compagnie Ondinnok a choisi de faire du Jardin botanique le théâtre de sa nouvelle création. À l’orée du bois, deux comédiennes déguisées en corbeaux attendent, une lanterne à la main.
La compagnie Ondinnok a choisi de faire du Jardin botanique le théâtre de sa nouvelle création. À l’orée du bois, deux comédiennes déguisées en corbeaux attendent, une lanterne à la main. Elles guideront les spectateurs à travers le Jardin de Chine et celui des Premières-Nations, où sont dissimulés Lynx et sa famille incestueuse, protagonistes de la légende de Kmùkamch, l’Asierindien. Cette création d’Yves Sioui Durand est découpée en tableaux qui retracent, à leur manière, la grande migration Asie-Amérique. Une fascinante excursion en forêt, à la découverte des (longues) racines des autochtones… Aventuriers, ne pas s’abstenir!
Kmùkamch (Yves Sioui Durand) est un vieillard incapable de se résoudre à laisser la jeunesse et ses plaisirs. Aujourd’hui, il se ferait probablement injecter du Botox entre les yeux, mais selon la légende, il s’offre une cure de jouvence plus "naturelle", en faisant l’amour à sa fille Hakalasi (Brigitte Poupart) et en tentant de faire de même avec l’épouse de son fils Lynx (Charles Bender), la superbe Latkakawas (Karine Ricard). Sur ces âmes en peine veille Tsorédjowa (Mireille Naggar), ainsi qu’une conteuse (Aimee Lee), lien entre ces spectres et les vivants lancés sur leurs traces. Avec cette création, la seule compagnie de théâtre autochtone professionnelle du Québec veut s’éloigner des images convenues ou folkloriques, et s’ouvrir sur le monde. Ainsi, des photos de femmes autochtones disparues, exécutées et torturées, fournies par Amnistie internationale, sont affichées sur le parcours.
Ne serait-ce que pour découvrir le Jardin de Chine illuminé, son étang et les pavillons où se découpent les silhouettes, l’expédition vaut l’effort. Il y a quelque chose d’exaltant dans cette randonnée nocturne rythmée par la musicienne Maryse Poulin… et par quelques canards! Ceux qui ont participé à l’aventure des Artistes Naturels de Momentum se trouveront en terrain connu.
Mais il y a plus que la beauté des lieux; il y a une histoire qui, sous ses allures de légende ancienne sur la perte de l’innocence, traite d’une obsession ô combien actuelle, celle de la beauté et de la jeunesse. Jusqu’où l’Homme est-il prêt à aller pour rester jeune, fringant, puissant? Si le récit est un peu confus au départ (Aimee Lee gagnerait à mieux projeter sa voix), le mystère est depuis longtemps levé quand, une heure plus tard, nous sommes conviés à prendre place dans une yourte chauffée, où le père et le fils s’affrontent une dernière fois, tandis que le public savoure un thé réconfortant. Heureux dénouement.
Jusqu’au 5 mai
Au Jardin botanique de Montréal