Le Cabaret des mots : Mots mystères
Scène

Le Cabaret des mots : Mots mystères

Est-ce dû à une concurrence trop féroce? Il semble que l’Espace Go ait de la difficulté à remplir sa salle pour les représentations du Cabaret des mots, un collage de textes du poète Jean Tardieu, réalisé et mis en scène par Paul Buissonneau, d’après une idée originale de la comédienne Danièle Panneton.

Est-ce dû à une concurrence trop féroce? Il semble que l’Espace Go ait de la difficulté à remplir sa salle pour les représentations du Cabaret des mots, un collage de textes du poète Jean Tardieu, réalisé et mis en scène par Paul Buissonneau, d’après une idée originale de la comédienne Danièle Panneton. Pourtant, ce spectacle assez exigeant est une des belles réussites de cette saison théâtrale, un objet artistique intrigant, fascinant et très complet.

Car la mise en scène de Buissonneau constitue un formidable voyage au coeur de la création artistique. Poésie, théâtre, mime, danse, peinture, vidéo, musique et lumière: toutes les disciplines artistiques (ou presque) se rencontrent et cohabitent à l’intérieur de ce grand petit spectacle.

Bien sûr, l’écriture de Tardieu est à l’avant-plan, avec des scènes tantôt graves, tantôt ludiques, des jeux de mots, des calembours à la Sol, et des exercices de style qui prouvent que le regretté auteur français était un gymnaste de la langue et un athlète de la grammaire.

Il y a aussi l’oeuvre du peintre Paul Rebeyrolle qui est très présente et qui semble répondre à celle de Tardieu. Tardieu et Rebeyrolle s’intègrent parfaitement dans l’univers fascinant de Buissonneau. Un monde servi par les sept comédiens transformés ici en véritables virtuoses. On retrouve bien sûr Danièle Panneton, mais aussi son vieux complice du Théâtre Ubu, le formidable Carl Béchard, ainsi que Pierre Chagnon, Violette Chauveau, Claude Prégent, François Sasseville et la trop rare Élizabeth Chouvalidzé. Sa première collaboration avec Paul Buissonneau remonte à… 1957. Scène mémorable que celle où elle danse un tango avec Claude Prégent, lançant avec désinvolture, à la manière d’une Arletty: "Le passé, c’est le passé!"

Le décor et les costumes, respectivement conçus par Mario Bouchard et Ginette Noiseux, évoquent la mode Art déco, soit la grande période du cabaret où le metteur en scène a situé sa pièce. Buissonneau explique avoir choisi la forme du cabaret parce que le langage rythmé de Tardieu est résolument musical. "L’idée de théâtre-spectacle s’est imposée très rapidement, écrit-il dans le programme. (…) Il existe une architecture de la scène au théâtre, traversée de fils tendus de part en part. Une partie de mon travail consiste à y projeter les corps dans une logique que le spectacle possède déjà. On n’invente rien, on retrouve ce qui doit être, c’est tout…"

Voilà une bien humble manière de nous montrer qu’il est un grand artiste.

Jusqu’au 18 mai
À l’Espace Go