Cabaret : Success story
Scène

Cabaret : Success story

Cinquante ans après sa création, Cabaret demeure d’une troublante actualité et un divertissement intemporel. Dans le cadre de la série Les Classiques de Broadway, la comédie musicale termine sa tournée nord-américaine à Montréal.  Showtime!

Comme les chats, Cabaret a plusieurs vies. Tour à tour pièces, films et comédies musicales à succès, l’oeuvre fait sans cesse l’objet de reprises et de nouvelles productions. La plus récente a été réalisée en 1993 à Broadway, pour le Round About Theatre, par nul autre que le metteur en scène Sam Mendes. Le talentueux réalisateur d’American Beauty a décidé de présenter le musical dans une véritable boîte de nuit; d’abord le Club Expo, puis le Studio 54 à Manhattan, deux discos qui étaient jadis des anciens théâtres. Le spectacle, toujours à l’affiche au Studio 54, a été louangé par la critique et a remporté huit Tony Awards.

C’est cette production que les Montréalais pourront voir, du 18 au 23 juin, à la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts, dans le cadre de la série Les Classiques de Broadway (Rent sera aussi présentée à la PDA, du 9 au 14 juillet). Une salle qui n’a rien d’un cabaret ou d’une discothèque, je vous l’accorde. Mais selon B.T. McNicholl, qui a pris la relève de Sam Mendes pour cette tournée, le décor et la mise en place sont identiques. "On a fait en sorte que le quatrième mur soit brisé même dans une salle à l’italienne: les acteurs sont sur scène avant le début du spectacle; ils regardent les spectateurs dans les yeux, il y a des scènes qui laissent de la place à l’improvisation, etc.", explique McNicholl, que Voir a joint chez lui à New York.

À l’origine, Cabaret, le musical écrit en 1967 par Joe Masteroff et sous la direction du grand Harold Prince, est tiré d’une nouvelle de Christopher Isherwood, et de la pièce de John Van Druten, I am a Camera, créée en 1952 à Broadway, avec Julie Harris. L’histoire relate la vie nocturne et décadente du Berlin de la fin des années 20 et du début des années 30 à travers les aventures de Sally Bowles, une jeune chanteuse d’un cabaret de troisième ordre, le Kit Kat Club, qui rêve de devenir une star internationale. En pleine montée du nazisme, en Allemagne, elle se laisse séduire par un auteur anglais de passage à Berlin, qui s’avérera un homosexuel dans le placard. Ce dernier tente de lui ouvrir les yeux sur les événements qui bouleversent son pays. En vain. Il la quittera alors qu’elle continue de chanter et de courir à sa perte.

Pour plusieurs d’entre nous, Cabaret, c’est le souvenir impérissable de la prestation de Liza Minnelli dans le long métrage de Bob Fosse, réalisé en 1972, et mettant aussi en vedette Michael York et Joel Grey (ce film a décroché une dizaine d’Oscars, dont celui de la meilleure actrice de l’année). La fille de Judy Garland a immortalisé le personnage de Sally Bowles avec son jeu et ses interprétations admirables des chansons de Johh Kander et Fred Ebb, telles que The Money Song, Don’t Tell Mama, et Maybe This Time.

"Le message de la pièce est très clair: si on refuse de regarder la réalité du monde dans lequel on vit, on court à sa perte, prévient B.T. McNicholl. Sally Bowles et les artistes des cabarets décadents du Berlin des années 20 et 30 ne se sentaient pas menacés par le nazisme. Ils préféraient fuir les responsabilités dans l’alcool, le plaisir et la drogue. Avec le résultat que l’on sait… La pièce nous dit que si tu ne fais rien pour lutter contre l’ennemi, tu es pour l’ennemi.?

Cabaret est donc un conte très moraliste sur les dangers de la décadence? "Hello Dolly, Carrousel, Lion King: dans toutes bonnes comédies musicales, on trouve une morale. Les musicals sont un peu des contes de fées pour adultes", admet le metteur en scène qui a travaillé sur des succès de Broadway tels que A Funny Thing Happened on the Way to the Forum, avec Nathan Lane et Whoopi Goldberg.

Dans le récit berlinois de Christopher Isherwood, Berlin est décrite comme "The Babylon of the World". Ironiquement, Cabaret a été créé à New York, une ville qui, dans les années 70, était un peu la Babylone de l’Amérique. Puis, durant la reprise à Broadway, au début des années 90, la métropole new-yorkaise nageait dans la crise du sida, qui a mis fin abruptement au party new-yorkais…

"Le parallèle entre Berlin et New York (et entre le nazisme et le sida) est inévitable, reconnaît B.T. McNicholl. La maladie est devenue une réalité incontournable. Mais pour plusieurs hommes gais, il était trop tard." En 2002, la nouvelle maladie serait-elle le terrorisme? Le metteur en scène ne s’aventurera pas sur ce terrain, mais il y a bien sûr, depuis le 11 septembre dernier, un mouvement culturel américain dont le patriotisme représente, aux yeux de certains, une nouvelle forme de décadence.

Reste que Cabaret est d’abord et avant tout un excellent divertissement, en danse (les chorégraphies sont de Rob Marshall et de Susan Taylor), en musique et en théâtre. Le rôle de Sally Bowles sera défendu par Allison Spratt; celui du M.C., qui raconte l’histoire au public et présente les numéros de cabaret, par Cristopher Sloan. Parmi les changements que Joe Masteroff a apportés au livret original, il y a des monologues du M.C. qui sont tirés d’improvisations exécutées par l’acteur Allan Cumming, qui a défendu le rôle à Londres et à New York. "Ce qui était choquant dans les années 60 ne fait plus de scandale aujourd’hui. Nous avons donc reproduit un univers plus sombre et destroy que la production de Prince. Les concepteurs se sont inspirés des peintures expressionnistes d’Otto Dix et de George Grosz. Mais aussi du glamour des bars du downtown new-yorkais?,?conclut B.T. McNicholl.

Du 18 au 23 juin
À la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts
The hero, an impressionable young writer who is a "camera" recording story makes