À propos de la neige fondante : Sens dessus dessous
La filière russo-montréalaise frappe encore, dans un repaire d’artistes de la rue Berri cette fois.
La filière russo-montréalaise frappe encore, dans un repaire d’artistes de la rue Berri cette fois. Le metteur en scène et comédien Igor Ovadis y présente À propos de la neige fondante, un collage de textes de Dostoïevski, traduits et adaptés en collaboration avec Serge Mandeville, d’Absoluthéâtre. Des farces pathétiques et inégales, servies par des interprètes qui ne craignent pas de forcer la dose. À voir pour le plaisir d’observer un grand acteur comique au travail.
Igor Ovadis est un instrument inouï, dont on commence à peine à effleurer les cordes au Québec. Le genre d’interprète qui n’a qu’à sortir le gros orteil des coulisses pour que la salle croule de rire. Pas étonnant que le Quat’Sous et le Théâtre La Chapelle aient retenu les services de ce comédien pour la saison à venir. Après Crime et Châtiment (présenté au Théâtre Denise-Pelletier), le tandem Ovadis-Mandeville se retrouve pour l’adaptation de quatre nouvelles de ce cher Fedor (Le Sous-sol, Bobok, Le Mari sous le lit, Le Crocodile). Le plus expérimenté des deux s’est réservé la mise en scène, tandis que son ex-étudiant hérite du rôle principal.
Avec les moyens du bord, l’équipe a aménagé un espace bordé de rideaux noirs, découpés de manière à permettre aux personnages de surgir à l’improviste des maisons et des livres peints sur les draperies. Comment résumer ce délire? On plonge dans la tête d’un auteur doté d’une conscience trop aiguisée, qui ne distingue plus la frontière qui sépare le vrai du faux, les morts des vivants, et le bien du mal. Autour de lui bourdonnent des créatures grotesques, dont une prostituée au coeur fragile, un mari cocu, sa femme, un dresseur de crocodiles, des macchabées et un valet nonchalant.
Outre Mandeville et Ovadis, Brigitte Lafleur, Stéfan Perreault, David-Alexandre Després et Sébastien Dodge se partagent les rôles. Tous ne maîtrisent pas avec autant d’aisance le texte exigeant de Dostoïevski, mais la fougue de cette jeune distribution rachète bien des hésitations. Et la prestation de Perreault en valet, puis en prisonnier d’un crocodile, est absolument irrésistible.
Voilà donc une pièce très dense et longuette, parsemée de flashs créatifs et jouée avec enthousiasme, dont il serait intéressant de voir une version resserrée. Quel sens tout cela a-t-il? Comme le laissent entendre sur scène deux marionnettes, venues faire un clin d’oeil à un autre grand dramaturge russe, il ne faut peut-être pas chercher là plus de sens que dans la neige qui tombe…
Jusqu’au 6 octobre
Espace Geordie