Hélène Blackburn : Pourquoi la danse?
Hélène Blackburn s’installe à l’Agora de la danse, du 9 au 19 octobre, pour présenter sa nouvelle production, Courage mon amour, après sa création à la Biennale de Venise.
Hélène Blackburn revient enfin à Montréal après avoir donné des représentations un peu partout au Canada. Elle va présenter une nouvelle création, fortement influencée par son travail passé. La conception d’un spectacle jeune public (Nous n’irons plus au bois) a beaucoup fait progresser la jeune chorégraphe québécoise.
"Ce qui m’a sauté aux yeux, c’est l’accroissement important des activités de la compagnie. Nous avons triplé le nombre de représentations en une année, notamment à cause du spectacle jeune public. Cela a augmenté notre charge de travail. Il s’est ainsi créé un questionnement, au sein de la compagnie et entre les danseurs, sur notre façon de travailler. Il nous fallait revenir à l’essence même de notre travail. En discutant avec les danseurs, je me suis aussi questionnée sur les raisons de cet art. La danse est plus qu’un art, c’est véritablement une vocation. Au fil des discussions se sont posées les questions: Pourquoi ont fait tout cela? Pourquoi repousser les limites? Pourquoi la danse?"
Courage mon amour est donc la réponse à toutes ces questions. Des réponses qui ne sont pas forcément explicites, mais dont on peut tirer certains enseignements. "Je dis souvent que, pour moi, la danse est l’art ultime, le plus profond, car l’instrument de cet art est le corps, avec les capacités et les limites qu’il réserve. Dans ce corps humain, on retrouve tout ce que l’on a été et tout ce que l’on sera. Il n’y a que la représentation du moment qui compte et l’effet créé par cette représentation. La danse reste aussi un art pur, car il n’y a pas vraiment de commercialisation, pas de produits dérivés. On peut donc rester honnête, modeste."
Cette philosophie transpire dans la chorégraphie de cette nouvelle création. Hélène Blackburn ne s’attache pas à un message particulier, elle souhaite simplement se questionner sur son art. Elle innove également en donnant la parole aux danseurs, même si elle se défend de cette originalité. "Je trouve qu’énormément de chorégraphes, notamment européens, le font aujourd’hui et la plupart sur le même propos, avec une parole reliée à la danse. Moi, je n’ai pas l’impression d’être originale, mais j’ai fait ça par besoin, tout simplement."
En guise d’innovation, la créatrice a décidé de travailler avec de la musique live, sur scène. "Le dialogue entre la musique et la danse est beaucoup plus riche, plus mobile, très vivant. Cela change complètement la perception de la musique par les danseurs et réciproquement. Les musiciens ne jouent pas de la même façon et les danseurs, eux, ne dansent pas de la même façon à chaque représentation, ou à chaque répétition. Cette expérience diffère vraiment de la danse exécutée sur des bandes-son enregistrées."
Par contre, la mise en scène des musiciens ne s’est pas réalisée facilement. "J’ai eu l’idée de prendre uniquement des violons, car je pensais que le violon était simple. Mais, après avoir lancé l’idée, il s’est avéré que c’était très compliqué. Je n’aurais pu m’en sortir sans l’aide des musiciens de l’Orchestre symphonique de Montréal. Ils m’ont aidée à faire le corpus musical de cette pièce. Sans eux, je n’y serais pas arrivée."
"Fondamentalement, on évolue au contact des autres. J’aime la confrontation et je n’ai pas peur d’exprimer mes idées. J’aime débattre, discuter, confronter mes idées et, dans le travail, c’est pareil. La résistance peut nous amener vers d’autres visions. C’est ce qui est intéressant. Au Québec, je trouve que l’on a peur des débats."
Sur le plateau, l’ancienne élève de Jean-Pierre Perreault et de Paul-André Fortier aime beaucoup travailler sur les duos pour exprimer cette confrontation, ces heurts. Elle crée une danse énergique, intense, voire violente, même si elle récuse le mot. "C’est vrai que j’ai un fort tempérament. J’aime les allegros, les choses enlevées… Je crois que je suis en train de devenir une vraie femme et je m’assagis peut-être un peu. Mais j’ai toujours eu plus de facilité à travailler avec les hommes, qu’avec les femmes… Les duos expriment souvent les problèmes de communication de la société en général, il ne faut pas les réduire seulement au couple homme-femme."
La nouvelle pièce d’Hélène Blackburn, Courage mon amour, veut simplement exprimer les difficultés de notre société par une ellipse poétique. Un beau programme en perspective.
Du 9 au 12 et du 16 au 19 octobre, à 20 h
À l’Agora de la danse