Andromaque : Génération X
Scène

Andromaque : Génération X

Peu importe le décor, Andromaque demeure une tragédie puissante écrite dans un style mesuré…

Après avoir monté Andromaque à la chapelle de l’église Saint-Vincent-de-Paul au printemps 2001, des diplômés de l’École de théâtre du Cégep de Saint-Hyacinthe reviennent à l’attaque, entre les murs couverts de graffiti du bar L’X.

Un décor trash inusité pour une tragédie classique intemporelle. Dirigés par le comédien et professeur Robert Lavoie, les interprètes maîtrisent mieux, cette fois, les vers raciniens mais gagneraient à doser les éclats de leurs personnages. Les choses s’améliorent, mais la guerre n’est pas encore gagnée…

Oreste aime Hermione, qui est éprise de Pyrrhus, qui ne pense qu’à Andromaque, qui n’arrive pas à oublier Hector, qui lui est mort. Les protagonistes de la tragédie de Jean Racine (écrite en 1667) sont prisonniers d’une funeste chaîne de passions surhumaines. Le roi, Pyrrhus, tentera par tous les moyens de venir à bout de la farouche détermination d’Andromaque, femme d’honneur, martyre de la guerre de Troie et mère d’Astyannax, le dernier des Troyens.

Sous la tunique de la veuve intraitable, Marie-Ève Soulard Laferrière vibre d’une rage qui gagnerait à être mieux contrôlée, de manière à suivre la progression du texte. Autour d’elle, Frédéric Boivin, Mélanie Laberge, Robert Lavoie, Jean Sébastien Poirier, Annie Ranger, Karine Ricard et Michel Savard interprètent de manière intéressante, quoique inégale, cette partition exigeante. Frédéric Boivin se démarque avec un Oreste naturel et attachant, sorte de bon gars prêt à tout pour plaire.

La salle de spectacle est petite et sombre, surplombée de passerelles qu’utilisent les comédiens pour quitter l’aire de jeu centrale. L’équipe de production a imaginé un décor, des costumes, des maquillages et des accessoires d’inspiration tribale, faits de peaux, d’os et de matières recyclées, parmi lesquels on trouve même une ceinture en bouchons de bière! Les interprètes masculins se sont rasé le crâne et se promènent avec des bottes d’armée au bout tranché, qui laissent voir leurs orteils. Inventif.

En 1985, un Andromaque était monté dans l’ancien bain public Laviolette par le Théâtre Acte 3; l’an dernier, c’est dans une église que la compagnie Phoenix XXXIV a tenté l’aventure; et cette fois, c’est dans un bar punk. Mais peu importe le décor, Andromaque demeure une tragédie puissante écrite dans un style mesuré, difficile à interpréter avec conviction. Que cette jeune distribution ait réussi, même imparfaitement, à dompter la langue et à insuffler de l’humanité aux alexandrins, c’est déjà un bon début.

Jusqu’au 2 novembre
À L’X