Les Célébrations : Le petit bonheur
Scène

Les Célébrations : Le petit bonheur

Avec Les Célébrations de Michel Garneau, le Théâtre de la Manuscule a déniché dans le répertoire dramaturgique québécois une pièce sur la vie à deux réjouissante comme un feel-good movie, dont on sort le sourire aux lèvres, convaincu que la vie vaut la peine d’être vécue. Et que l’amour ne rend pas nécessairement cocu.

Avec Les Célébrations de Michel Garneau, le Théâtre de la Manuscule a

déniché dans le répertoire dramaturgique québécois une pièce sur la vie à deux réjouissante comme un feel-good movie, dont on sort le sourire aux lèvres, convaincu que la vie vaut la peine d’être vécue. Et que l’amour ne rend pas nécessairement cocu.

Plus de 25 ans après sa création, ce huis clos entre un homme, Paul-Émile (Louis-Olivier Mauffette), et sa compagne de vie, Margo (Annie Charland), n’a rien perdu de sa fraîcheur ni de sa pertinence. Au contraire, puisque les couples se multiplient ces jours-ci sous les projecteurs, comme en témoigne entre autres la création à L’Espace libre d’Henri et Margaux, pièce conçue et interprétée par un couple. Pour comprendre les amoureux d’aujourd’hui, quoi de mieux que d’observer ceux qui les ont engendrés, il y a 20 ou 30 ans, dans un Québec en pleine effervescence?

Pour ce faire, un voyage dans le temps s’impose. Le metteur en scène Olivier Aubin et son équipe ont choisi de monter cette ode à la vie telle quelle, sans tenter une transposition dans les années 2000. Une heureuse initiative. Ils ont reconstitué dans la Salle Fred-Barry un microcosme des années 1970; tout y est, grâce au souci du détail des concepteurs, dont Frédéric Caron aux costumes, et Marilyn Gilbert, qui a créé un décor évocateur composé de bibliothèques modulaires de bois et de gigantesques fauteuils en rotin.

Margo et Paul-Émile sont "accotés" depuis six ou sept ans, ils ne se rappellent pas, et toujours amoureux, ça ils ne cessent de se le dire. Lui est prof de philo, elle psychologue. Alors ils parlent beaucoup: lui de sa peur de mourir; elle, de sa hâte de donner vie. Ils nous offrent 12 tranches de vie, qui débutent toutes par une chanson et se terminent par un serment d’amour. D’abord légers et amusants, leurs échanges les mènent vers des réflexions profondes, voire métaphysiques. Ainsi, quand Paul-Émile annonce qu’il vit un enfer depuis qu’il a cessé de fumer, Margo se moque gentiment de lui et l’encourage à recommencer, jusqu’à ce qu’il lui révèle son obsession de la mort. Au tour de Margo de s’inquiéter.

Ce qui fait le charme de ce moment de théâtre, c’est en grande partie les mots poétiques et drôles du grand raconteur Michel Garneau. L’homme de parole a imaginé des dialogues intelligents qui portent l’empreinte des préoccupations politiques de l’époque, féminisme en tête. Alors qu’aujourd’hui, le cynisme paralyse trop souvent, Margo et Paul-Émile manifestent une émouvante confiance en l’avenir. Le no future, très peu pour eux. Leur but, c’est de durer, d’abord en tant qu’individus mais aussi en tant que couple.

Pour les incarner, deux talentueux diplômés de l’Option-Théâtre du Collège Lionel-Groulx. Annie Charland et Louis-Olivier Mauffette sont convaincants en intellectuels qui scrutent à la loupe leurs sentiments, taquins quand il le faut et toujours complices. Cette tendresse entre les interprètes contribue à l’effet euphorisant que produit ce court spectacle sans prétention. Pour jouir de ce petit bonheur, il faut faire vite, puisqu’il ne reste plus que quelques représentations…

Jusqu’au 26 octobre
À la Salle Fred-Barry