Les Girls : Sages femmes
De mémoire, je me souviens d’une citation d’Oscar Wilde qui disait "qu’il ne faut pas trop flatter ses idoles, sinon leur dorure reste sur nos doigts"!
De mémoire, je me souviens d’une citation d’Oscar Wilde qui disait "qu’il ne faut pas trop flatter ses idoles, sinon leur dorure reste sur nos doigts"!
Sophie Clément aurait dû s’inspirer de cette pensée. Car le spectacle qu’elle met en scène, Les Girls arrivent en ville, au Théâtre du Rideau Vert, jusqu’au 7 décembre, se complaît un peu trop dans l’adoration. Cette production plaira peut-être aux fans de Clémence DesRochers, mais elle risque d’ennuyer le profane qui n’y verra qu’un joli show de variétés. Sans plus.
Le Rideau Vert accueille Clémence "les bras ouverts", dixit la directrice générale, Mercedes Palomino, dans le programme des Girls. La compagnie a même inscrit le nom de Clémence en grosses lettres sur la façade du théâtre, rue Saint-Denis. Bien sûr, avec 45 ans de métier et une oeuvre riche et variée, l’auteure, poète et humoriste mérite l’amour et le respect de tous. De Michel Tremblay à Yvon Deschamps, son influence auprès des artistes québécois est majeure.
Or, à mon avis, afin de bien lui rendre justice, on ne doit pas que la vénérer. Il faut aussi insuffler à son oeuvre une bonne dose de subversion, d’iconoclasme et de provocation. Suivre les traces de Clémence, donc, qui se servait du comique pour mieux secouer les conformismes sociaux.
Malheureusement, Les Girls dirigé par Sophie Clément est un show beaucoup trop sage et poli. Sa mise en scène ressemble à celle d’un spectacle du Casino de Montréal; l’authenticité et la simplicité de l’univers de Clémence se dissolvent dans ce côté clinquant. Vêtues de noir comme pour un soir de gala, les cinq interprètes évoluent dans un décor rouge et noir. Malgré tout, celles-ci (Andrée Lachapelle, France Castel, Monique Richard, Nathalie Gadouas et Sylvie Ferlatte) font un excellent travail. Ces comédiennes savent donner toutes les couleurs de l’immense palette de Clémence, tantôt émouvantes, tantôt coquines, parfois graves, parfois comiques.
Au piano, Nadine Turbide (en alternance avec Brigitte LeClerc) les accompagne discrètement. La direction musicale a été assurée efficacement par Catherine Gadouas.
L’ordre des numéros cause aussi problème. Le spectacle débute sur une note poétique et touchante (avec les chansons tristes de Clémence). Puis la troupe change de rythme abruptement et enfile les sketchs drôles. Certes, Sophie Clément a voulu rendre les nombreux aspects de l’oeuvre de cette artiste touche-à-tout. Or, elle aurait pu ajouter une lecture, une couche de plus. Car, soyons honnêtes, il y a des textes de Clémence qui ont vieilli plus vite que d’autres.
Créé en 1969, avec Clémence, Diane Dufresne, Louise Latraverse, Paule Bayard et Chantal Renaud, Les Girls a souvent été repris et remodelé au fil des années. Le répertoire de Clémence étant riche et éclectique, on peut aisément proposer de nouvelles versions. Mais celle que nous offre le Rideau Vert reste trop sage et conventionnelle. On aurait souhaité un peu plus de folie et d’irrévérence pour célébrer une artiste pas comme les autres.
Jusqu’au 7 décembre
Au Théâtre du Rideau Vert