Laurence Lemieux : Lettres de Russie
La chorégraphe Laurence Lemieux a trouvé dans la nouvelle traduction du roman épistolaire Les Pauvres Gens, de Dostoïevski, la matière de sa nouvelle pièce, Varenka, Varenka!.
Danse-Cité présente sa formule intégrale 20, au Studio de l’Agora de la danse, du 22 au 25 janvier et du 29 janvier au 1er février. Intitulé Varenka, Varenka!, le projet de la chorégraphe Laurence Lemieux s’inspire du roman épistolaire Les Pauvres Gens, de Fedor Dostoïevski.
C’est durant un voyage à Saint-Pétersbourg que la chorégraphe est tombée en amour avec le pays des anciens tsars, du chant viril des militaires, des danses enivrantes, des grands espaces, de la troïka et de cette délicieuse eau-de-vie qu’est la vodka: "La richesse en Russie, ce sont les gens et la culture…, affirme-t-elle. En Amérique, on est peut-être nantis matériellement, mais à cause de cela, on devient souvent pauvres de coeur."
Sa rencontre avec André Markowicz, un des traducteurs de l’oeuvre de Dostoïevski, a été décisive: "Lorsque je l’ai entendu parler du rythme d’écriture de l’écrivain russe qu’il avait dû respecter lors de sa traduction du roman Les Pauvres Gens, j’ai tout de suite senti une familiarité avec la danse."
Pourquoi s’inspirer d’un récit écrit sous forme de correspondance? "Le concept des lettres est intéressant dans la mesure où cela se rapproche de l’idée du solo. Chacun écrit seul dans son coin, dans l’optique d’un duo virtuel", répond la chorégraphe. Cette virtualité existant entre Makar Devushkin et Varenka Dobroselova, les protagonistes de ce roman d’amour, demeure un concept très actuel, malgré le siècle et demi qui la sépare de notre époque.
La scénographie de David Gaucher fait également en sorte que nous percevions le propos sous un angle contemporain. Il s’agit d’une structure cubique de style moderne rappelant l’ambiance de pauvreté grisâtre et oppressante qui régnait sur Saint-Pétersbourg au milieu du 19e siècle. Cet état se traduit d’ailleurs jusque dans le repliement corporel propre à la gestuelle qu’interpréteront Bill Coleman et Laurence Lemieux.
De plus, les costumes confectionnés par Sofi Dagenais ont été volontairement usés pour renforcer l’ambiance d’indigence. Et pour couronner le tout, les éclairages de Pierre Lavoie et la musique originale de l’accordéoniste russe Vladimir Sidorov sauront transporter l’oeil et l’oreille au coeur de cet univers mis en place par la chorégraphe.
Varenka, Varenka! suscite une réflexion intéressante sur la notion de bonheur dans la société actuelle: l’idéal romantique de l’amour impossible y est dorénavant soutenu par un arsenal technologique qui encourage les échanges humains à travers une virtualité qui n’est plus, comme autrefois, simplement platonique, mais malheureusement superficielle et dénuée de toute créativité.
Au Studio de l’Agora de la danse
du 22 au 25 janvier et du 29 janvier au 1er février
À surveiller
Tangente présente Zone Gigue de Marie-Soleil Pilette et Machines de Lük Fleury, du 23 au 26 janvier. Même si l’on tend à associer la gigue au folklore, ces deux artistes réussissent à nous démontrer qu’il existe bel et bien un pont entre la société actuelle et la tradition liée à cette danse qui serait originaire des anciens pays du Royaume-Uni. Il s’agit donc d’une vision contemporaine d’un art de bouger vieux de plusieurs siècles.