Le Heurtoir : Frapper l'oeil
Scène

Le Heurtoir : Frapper l’oeil

Sur l’écran des paupières de Thomas défilent de drôles d’images. À quoi peuvent bien ressembler les derniers instants d’un jeune homme d’affaires victime d’un arrêt cardiaque? C’est ce que donne à voir de manière fantaisiste Le Heurtoir, un huis clos pour marionnette, comédiens et lumières conçu par José Babin. Cette espèce de voyage dans la tête d’un entrepreneur à dreads est à la fois convenu, par sa morale, et très poétique, en grande partie grâce à l’inventivité du joueur d’ombres Alain Lavallée.

Sur l’écran des paupières de Thomas défilent de drôles d’images. À quoi peuvent bien ressembler les derniers instants d’un jeune homme d’affaires victime d’un arrêt cardiaque? C’est ce que donne à voir de manière fantaisiste Le Heurtoir, un huis clos pour marionnette, comédiens et lumières conçu par José Babin. Cette espèce de voyage dans la tête d’un entrepreneur à dreads est à la fois convenu, par sa morale, et très poétique, en grande partie grâce à l’inventivité du joueur d’ombres Alain Lavallée.

Ce Heurtoir frappe l’oeil. Les éclairages de Sylvain Letendre sculptent la matière et la découpent avec précision. L’équipe a en quelque sorte conçu son spectacle à l’envers, en s’inspirant d’objets (grille-pain, rasoir, arrosoir) et d’effets lumineux pour inventer le reste. D’où la grande finesse des éclairages, manipulés par Chloé Besner (à la régie) ainsi que par les comédiens Marcelle Hudon et Stéphane Théorêt, qui se baladent une lampe à la main. Un rideau de tulle voile la vue; il sera heureusement levé en cours de route. Parmi les flashs intéressants, il y a l’ombre vacillante du squelette Érectus projetée sur un rideau blanc et des images mouvantes inspirées de la préhistoire. Du joli.

Si la forme impressionne, le fond est un peu vaseux. L’auteure José Babin affirme ne pas avoir voulu raconter d’histoire. Il y en a pourtant une, celle des derniers instants de Thomas, mais elle fait du sur-place. Et la morale nous est martelée du début à la fin du spectacle, au point où l’on se demande si le texte, notamment les monologues de Thomas, était bien nécessaire. La leçon est rapidement comprise: la vie n’est pas une piste de course.

Heureusement, des touches de folie surgissent ici et là, avec cette archéologue qui émerge d’une trappe (délicieuse Marcelle Hudon), un heurtoir dans la main, plus délirante que Thomas, un archétype en costard qui vocifère dans son cellulaire. Quant à la marionnette fétiche du Théâtre Incliné, Érectus, elle traverse la scène à quelques reprises, fantôme trop discret dont on saura bien peu de choses. On s’attendait à plus du squelette de ce spectacle…

Pour finir sur une bonne note (!), mentionnons l’important apport du contrebassiste Jean Christian Houde, qui fait naître toutes sortes d’ambiances en direct, penché sur son instrument. Ses interventions ajoutent à la poésie qui se dégage de cette création perfectible, dont il serait intéressant de voir une version retravaillée.

Jusqu’au 2 mars
À l’Espace libre