Le Malentendu : Crier pour être entendu
Scène

Le Malentendu : Crier pour être entendu

Pour monter Le Malentendu d’Albert Camus, il faut des talents de funambule, savoir s’avancer dans la tragédie avec rigueur et sobriété pour éviter de verser dans le grotesque. Un grand défi, trop peut-être pour la nouvelle compagnie de Théâtre En Fu, qui multiplie les faux pas. Rendez-vous manqué, donc, entre le metteur en scène Marc Dumesnil et cette oeuvre oppressante, écrite en 1941 et portée à la scène en 1944 dans une France occupée "au souffle court", peu avant la fin de la Deuxième Guerre mondiale.

Pour monter Le Malentendu d’Albert Camus, il faut des talents de funambule, savoir s’avancer dans la tragédie avec rigueur et sobriété pour éviter de verser dans le grotesque. Un grand défi, trop peut-être pour la nouvelle compagnie de Théâtre En Fu, qui multiplie les faux pas. Rendez-vous manqué, donc, entre le metteur en scène Marc Dumesnil et cette oeuvre oppressante, écrite en 1941 et portée à la scène en 1944 dans une France occupée "au souffle court", peu avant la fin de la Deuxième Guerre mondiale.

Une mère et sa fille, Martha, tiennent une auberge en dehors des circuits touristiques. Les voyageurs arrivent au compte-gouttes et sont chaque fois drogués, volés puis noyés dans la rivière. Survient un jour dans leur demeure de bois Jan, le fils de la maison, revenu de sa longue absence les poches pleines d’argent. Tandis que son épouse Maria l’attend dans un hôtel, il loue une chambre à l’auberge, sans révéler son identité. Les deux femmes ne le reconnaissent pas mais jugent son comportement inhabituel, ce qui n’empêche pas Martha de passer aux actes. Une erreur sur la personne lourde de conséquences…

S’inspirant d’un fait divers, l’écrivain et humaniste a écrit une véritable tragédie moderne, dans laquelle on retrouve les grands thèmes de l’existentialisme, dont la solitude absolue de l’homme abandonné par Dieu – si toutefois il existe! -, et son aspiration à la joie, à l’amour et au bonheur. Cette première pièce, rattachée à son cycle de l’absurde, ne manque

donc pas d’intérêt, même si la version bancale qu’en offre le Théâtre En Fu est décevante à plusieurs égards.

Marc Dumesnil dit s’être servi d’une phrase du peintre belge Léon Spiliaert – "Être moi tous les jours de plus en plus fort" – comme fil conducteur. Être authentique, c’est bien, mais être précis et inventif, ça n’aurait pas été une mauvaise affaire non plus… La mise en scène aurait pu sécréter une atmosphère plus étrange, plus étouffante. Les interprétations d’Ariane Frédérique (Martha) et de Marie-Josée Normand (Maria) manquent de naturel et de nuance, surtout lors des scènes de cris et de pleurs, difficilement supportables. Francine Beaudry et Martin Rouleau jouent honnêtement, tandis

que Jacques Rossi offre peut-être la meilleure performance de la soirée… dans le rôle quasi muet du vieux domestique. C’est dire.

Jusqu’au 8 mars
À la Salle Fred-Barry