La Cantatrice chauve : Au poil !
Scène

La Cantatrice chauve : Au poil !

Le Théâtre de la Maison jaune avait tout un défi à relever en reprenant à la Salle Fred-Barry sa version intimiste de La Cantatrice chauve, jouée avec succès en 2001 dans le bed & breakfast du metteur en scène Sylvain Binette, rue Saint-Hubert. Du salon d’époque au théâtre, cette Cantatrice n’a pas perdu un poil de sa vertigineuse drôlerie… et continue de se coiffer de la même façon! Un passage réussi, donc, pour ce désopilant spectacle qui nous transporte chez les Smith, un couple fou furieux qui affectionne les phrases creuses et les proverbes insensés.

Le Théâtre de la Maison jaune avait tout un défi à relever en reprenant à la Salle Fred-Barry sa version intimiste de La Cantatrice chauve, jouée avec succès en 2001 dans le bed & breakfast du metteur en scène Sylvain Binette, rue Saint-Hubert. Du salon d’époque au théâtre, cette Cantatrice n’a pas perdu un poil de sa vertigineuse drôlerie… et continue de se coiffer de la même façon! Un passage réussi, donc, pour ce désopilant spectacle qui nous transporte chez les Smith, un couple fou furieux qui affectionne les phrases creuses et les proverbes insensés.

Première "anti-pièce" d’Eugène Ionesco, cette célèbre parodie de drame Bourgeois, créée en 1950, se déroule dans le salon anglais, chic et de bon goût de M. et Mme Smith, qui attendent l’arrivée de M. et Mme Martin, en raccommodant des chaussettes anglaises et en lisant un journal anglais (qui est en fait en arabe!). Un silence (anglais) règne. Une fois les Martin arrivés, une conversation sans queue ni tête s’amorce d’abord timidement, puis s’emballe, entre autres au sujet d’un grand mystère: y a-t-il quelqu’un qui sonne à la porte? Délirant.

Le metteur en scène de cette production très dynamique a voulu ajouter une dimension psychologique à l’oeuvre du maître du théâtre de la dérision, sans en trahir l’esprit absurde. Ainsi, Sylvain Binette met en relief l’inquiétude, le désarroi et le malaise des personnages. Cette angoisse et la vacuité de leurs échanges n’ont rien de démodé; à preuve, elles rappellent ce que donne à voir François Archambault dans sa nouvelle création, La Société des loisirs (à l’affiche de la Licorne), où un autre couple prisonnier de son intérieur bourgeois s’affronte. Plus ça change…

Bien dirigés, les comédiens font valser des mots vidés de leur sens – qu’Ionesco nommait ses écorces sonores – avec rigueur et précision, sans cabotinage, à proximité des spectateurs installés de trois côtés de la scène. Les Smith sont incarnés par Serge Mandeville et Chantal Valade, lui taciturne et colérique, elle assurée, avec une moue très british… Le couple Martin est composé de Benoît Ouimet et d’Isabelle Drainville, aux mimiques expressives. S’ajoute, sous la robe trop courte de la bonne Mary, ‘excellente Mélanie Delisle, qui se charge de faire sonner (quand bon lui semble) la pendule déréglée, à coups d’archets. Enfin, le metteur en scène apparaîtra sur scène, dans le rôle du pompier à la recherche d’un feu de paille.

Comme c’est curieux, comme c’est bizarre, pour reprendre les mots de la pièce… mais surtout, comme tout cela est bien ficelé! C’est un fort joli cadeau qu’offre là cette jeune compagnie, tout juste sortie de l’auberge…

Jusqu’au 29 mars
À la Salle Fred-Barry