Le Révizor : Marquer des points
Scène

Le Révizor : Marquer des points

Les coquins portent chance au Théâtre Denise-Pelletier. Après avoir repris le louangé Menteur de Corneille – Masque de la meilleure production montréalaise en 1999-2000 – , le TDP termine sa saison avec une version savoureuse du Révizor de Gogol, dans laquelle un autre fabulateur s’invente une vie glorieuse pour épater la galerie, cette fois en se faisant passer pour un inspecteur général. Tel un révizor en mission, accordons donc (sans pot-de-vin!) une bonne note à cette comédie sur la corruption montée par un Reynald Robinson rassembleur, qui a su mettre au diapason une imposante équipe.

Les coquins portent chance au Théâtre Denise-Pelletier. Après avoir repris le louangé Menteur de Corneille – Masque de la meilleure production montréalaise en 1999-2000 – , le TDP termine sa saison avec une version savoureuse du Révizor de Gogol, dans laquelle un autre fabulateur s’invente une vie glorieuse pour épater la galerie, cette fois en se faisant passer pour un inspecteur général. Tel un révizor en mission, accordons donc (sans pot-de-vin!) une bonne note à cette comédie sur la corruption montée par un Reynald Robinson rassembleur, qui a su mettre au diapason une imposante équipe.

L’action se déroule dans une petite ville de la Russie tsariste du 19e siècle. Des propriétaires fonciers de l’endroit croient reconnaître dans un hôtel un inspecteur général envoyé de Saint-Pétersbourg par l’empereur. Il s’agit plutôt d’un petit fonctionnaire ruiné par le jeu, qui décide de profiter de la méprise. Craignant que ce (faux) révizor découvre la corruption qui règne dans la ville, les notables rivalisent d’ardeur pour le conquérir; il se fiancera même à la fille du maire. Les masques finiront par tomber grâce à la curiosité du maître des postes.

De l’excès en toute chose, telle semble être la devise de cette production fantaisiste d’un texte assez classique, qui comporte même quelques longueurs. Un bon point pour Robinson, donc, qui a su s’adapter à l’immensité de la salle. Avec ses passerelles noires, la scénographie de Patricia Ruel apparaît comme un bel hommage au constructivisme russe, tandis que les costumes aux proportions extravagantes de Linda Brunelle accentuent le côté fabuleux du spectacle. Avec son habit rembourré, le maire a même quelques airs de famille avec l’imposant Falstaff qu’incarnait Rémy Girard dans Les Joyeuses Commères de Windsor...

Dans le rôle du profiteur Khlestakov, Daniel Parent se déchaîne et multiplie les cabrioles sans que cela nuise à la sincérité de son jeu. Plus terre-à-terre, Gilles Renaud offre un contrepoids intéressant dans le rôle du maire, tandis que la jeune Géraldine Charbonneau est d’une naïveté craquante en adolescente complètement gaga. Jouant texte en main, Adèle Reinhardt remplace à pied levé (et avec le talent qu’on lui connaît) Danièle Panneton, blessée à quelques jours de la première. Enfin, mentionnons les compositions amusantes de Roger Léger, en valet grincheux, de Marc Bélanger, en directeur des postes fouineur, et de Jacques Girard et Marcel Pomerlo, irrésistible duo de potineurs.

La traduction d’André Markowicz, qui a accompli un travail audacieux sur Dostoïevski, est particulièrement vive et claire, très moderne, avec quelques clins d’oeil au public étudiant.

Créé en 1836 dans la controverse, Le Révizor n’a rien perdu de sa pertinence, alors que la corruption se pratique toujours et que la quête de sens de ceux qui ont évacué toute spiritualité est loin d’être terminée. Tandis que les politiciens sillonnent la province pour serrer des mains, cette dénonciation de la malhonnêteté et de l’ambition à outrance est d’une actualité réjouissante.

Jusqu’au 5 avril
Au Théâtre Denise-Pelletier