Danser à Lughnasa : Sans faux pas
Scène

Danser à Lughnasa : Sans faux pas

La fête païenne orchestrée par le metteur en scène irlandais Ben Barnes au Théâtre du Nouveau Monde a quelque chose d’envoûtant. Présentée pour la première fois en français au Québec, la pièce à succès Dancing at Lughnasa, de son compatriote Brian Friel, expose avec sensibilité les petits et grands drames vécus par cinq soeurs durant la fête des moissons de l’été 1936 à Ballybeg, un hameau du comté de Donegal semblable en tous points à un village du Québec rural des années 30. Avis à ceux qui auraient envie de voir du pays: ce regard sur un passé – heureusement! – révolu se transportera au Bic cet été grâce à une coproduction avec le Théâtre les gens d’en bas.

La fête païenne orchestrée par le metteur en scène irlandais Ben Barnes au Théâtre du Nouveau Monde a quelque chose d’envoûtant. Présentée pour la première fois en français au Québec, la pièce à succès Dancing at Lughnasa, de son compatriote Brian Friel, expose avec sensibilité les petits et grands drames vécus par cinq soeurs durant la fête des moissons de l’été 1936 à Ballybeg, un hameau du comté de Donegal semblable en tous points à un village du Québec rural des années 30. Avis à ceux qui auraient envie de voir du pays: ce regard sur un passé – heureusement! – révolu se transportera au Bic cet été grâce à une coproduction avec le Théâtre les gens d’en bas.

C’est avec tendresse que le dramaturge irlandais rend hommage à ces soeurs solidaires (Catherine Allard, Louise Laprade, Fanny Mallette, Dominique Quesnel, Marie-Ève Tremblay) qui élèvent ensemble Michael, sept ans, fils de la cadette Chris et de Gerry Evans, un rêveur qui la visite une fois l’an (Renaud Paradis). C’est ce petit Michael devenu grand (Maxime Denommée) qui raconte cet été de bouleversements et en dévoile les conséquences. Durant les deux heures trente que dure ce spectacle au rythme lent, la simplette Rose s’amourache d’un homme marié; Gerry Evans – "cet animal!" comme le surnomme Kate, l’aînée – se pointe le bout du museau; et leur frère Jack (Eudore Belzile) revient à la maison après 25 ans de mission en Afrique, dans des circonstances troubles. Et voilà les grenouilles de bénitier qui se mettent à coasser…

Sans compter les caprices de Marconi, leur bien-aimé poste de radio, qui transforme la cuisine en piste de danse quand il daigne fonctionner. Les portions chorégraphiées de Danser à Lughnasa sont particulièrement réussies, et parfois émouvantes. Dans ce qui est peut-être la scène la plus marquante de cette production, les soeurs s’inventent une danse libératrice complètement délirante, à laquelle se joint même la très pieuse Kate, dont les mouvements secs et désespérés déclencheront les applaudissements du public.

Pour sa quatrième mise en scène d’un texte irlandais à Montréal (et sa première en français), le directeur artistique de l’Abbey Theatre de Dublin a misé sur la sobriété, exigeant une grande retenue des concepteurs (voir la très belle scéno de Guido Tondino, avec son jardin poétique) et des interprètes. Le résultat est probant, particulièrement chez Eudore Belzile, en sympathique ahuri, Louise Laprade, revêche à souhait, Dominique Quesnel, délurée, et enfin Fanny Mallette, dont chaque réplique suscite le rire.

Grâce à la traduction limpide et ludique de Paul Lefebvre, plusieurs des répliques font mouche, dont les "Ça fait que." sans appel dont Rose ponctue ses affirmations. Une grande partie de l’intérêt de cette pièce réside d’ailleurs dans ces dialogues incisifs, ainsi que dans les frasques des personnages, typés et attachants. Même si Michael révèle avant l’entracte que le dénouement sera tragique, le ton qu’utilisent les cinq soeurs est souvent léger, badin, empreint d’humour et de grâce. Pas étonnant qu’on ait surnommé Brian Friel le Tchekhov irlandais.

Jusqu’au 24 avril
Au Théâtre du Nouveau Monde