Le Seuil du palais du roi – Entrevue avec Christian Lapointe : Art sacré
Scène

Le Seuil du palais du roi – Entrevue avec Christian Lapointe : Art sacré

La culture irlandaise le fascine depuis longtemps; l’Orient l’intrigue. CHRISTIAN LAPOINTE conjugue ces deux sources d’inspiration pour mettre en scène un grand auteur irlandais: William Butler Yeats.

Directeur artistique du Théâtre Péril, un théâtre qui, fondé en 2000, "a comme mandat de prendre des risques", Christian Lapointe revient, avec sa compagnie, de trois mois de travail théâtral au Vietnam. Il a fait aussi, depuis 1999, deux séjours en Irlande: il approfondit alors sa connaissance de l’oeuvre de Yeats (1865-1939), poète et dramaturge, Prix Nobel de littérature en 1923.

Après Le Chien de Culann, en 2001, Le Seuil du palais du roi est son deuxième Yeats. La pièce s’inspire d’une vieille légende irlandaise: subissant la pression de ses conseillers, le roi congédie du conseil royal le maître des arts de son royaume. Celui-ci, un poète, entreprend, sur les marches du palais, une grève de la faim. "Si quelqu’un meurt de faim devant le seuil d’autrui, cette maison-là va être maudite par le peuple. Même si c’est celle du roi, explique Christian Lapointe. Le roi essaie de maintenir le poète en vie, sans pouvoir le réintégrer au conseil; il n’est qu’un vulgaire pantin. Le poète est presque un poète magicien, qui fait un acte messianique pour sauver la beauté du monde. C’est une véritable tragédie: le poète ne peut pas céder, parce que s’il cède le monde va être pourri; le roi ne peut pas céder non plus, sous peine de perdre son pouvoir."

Pour mettre en scène Le Seuil du palais du roi, Christian Lapointe s’inspire du travail fait par Yeats, dans une période postérieure à la pièce, alors qu’il "cherchait dans le nô japonais et la tragédie grecque la forme pour faire sa tragédie irlandaise nationale". Théâtre masqué, mouvements stylisés, la mise en scène et le jeu rappellent en effet la tragédie grecque, par "la largeur physique", et les formes orientales codées, par "les pas, plutôt glissés, les mouvements des bras, la gestuelle". Aucun désir, toutefois, de calquer ces formes; le metteur en scène les utilise, plutôt, pour créer son propre langage, "très loin du réalisme: j’aime mieux aller complètement dans la théâtralité, le rituel."

"Le Yeats que je fais, c’est quasiment un laboratoire, poursuit-il. C’est un théâtre que je cherche avec les acteurs et les concepteurs, avec un bagage qui est celui de Yeats." À ses côtés, les comédiens Marcelo Arroyo, Emmanuel Bédard, Serge Bonin, Véronique Côté, Nicolas Létourneau, Alexandre Morais, Caroline Tanguay, Hugo Turgeon et les concepteurs Danielle Boutin, Valérie Gagnon-Hamel, Claudia Gendreau, Jean-François Labbé, Félix Bernier-Guimond.

"J’ai choisi cette pièce parce qu’elle exprimait clairement mes idées sur la nécessité de l’art dans notre société. Elle montre bien, aussi, la position de Yeats par rapport à son oeuvre et à la politique. On y retrouve l’homme; c’est Yeats qui est là sur le devant du palais, c’est évident."

Jusqu’au 19 avril

Au Théâtre Périscope
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