Marie-Stéphane Ledoux : Cabaret dadaïste??
Scène

Marie-Stéphane Ledoux : Cabaret dadaïste??

Avec Les Pierreuses, la chanteuse-danseuse MARIE-STÉPHANE LEDOUX rend hommage aux artistes féminines de l’entre-deux-guerres. Un spectacle humoristique à l’esthétique grotesque, créé à la manière des mouvements dadaïste et surréaliste.

Au début du 20e siècle, la découverte des pouvoirs cachés de l’inconscient par la psychanalyse met en perspective tout un pan de la nature humaine qui, jusque-là, était resté dans l’ombre – du moins chez les Occidentaux. Les pulsions et les désirs refont alors surface, nous permettant de jeter une lumière sur une série de comportements qu’on croyait inexplicables. Cet avènement ouvrira la voie à une nouvelle façon d’entrevoir l’art, c’est-à-dire comme une production de l’inconscient. De nombreux artistes, à commencer par les dadaïstes et les surréalistes, profitent alors de l’occasion pour élaborer une réflexion sur l’art qui va révolutionner les moeurs de l’époque.

C’est dans cet esprit que Marie-Stéphane Ledoux rend hommage à des artistes féminines telles que Nancy Cunard, Kiki de Montparnasse, Valeska Gert, Fréhel et Damia, avec son spectacle Les Pierreuses. Cette pièce, appartenant au répertoire de la compagnie Mia Maure danse depuis 1995, nous fait découvrir un répertoire de chansons grotesques qui furent au programme des cabarets de l’entre-deux-guerres, soit de 1920 à 1939: une période de grands bouleversements sur le plan mondial. En effet, ce fut entre autres le début d’une période d’affirmation pour certaines artistes européennes qui lancèrent la première vague d’une révolution féminine.

Pour reprendre les paroles de Marie-Stéphane Ledoux: "Ces femmes revendiquaient leur droit d’être autrement et leur droit au plaisir. Chacune, à sa façon, a su modifier la perception de l’image des femmes, et ainsi de nouveaux rapports se sont établis entre corps, sexualité et pouvoir." C’est pourquoi la moquerie et les postures grotesques de la chanteuse-danseuse viendront appuyer les textes et musiques réarrangées par Claude St-Jean, qui sera accompagné sur scène par Jean-Denis Levasseur, Tommy Babin, Rémi Leclerc et Luzio Altobelli.

Afin de créer une corporéité qui soit adéquate à l’expression d’une telle thématique, la chorégraphe-interprète s’est retirée en studio en compagnie de Louis Pelchat, co-concepteur de la pièce; et c’est à l’aide du mouvement authentique – une approche corporelle de création spontanée, maîtrisée par Pelchat depuis plus de 10 ans – que la pièce a pris forme. Un contexte d’associations libres, commun aux mouvements dadaïste et surréaliste, a donc été privilégié dans ce processus de création.

On appelait les Pierreuses ces femmes qui se prostituaient dans les bas quartiers de Paris, et qui pratiquaient leur métier parmi les pierres des fortifications en ruine qui entouraient autrefois la ville. L’oeuvre de Marie-Stéphane Ledoux nous fait donc revivre d’une façon poétique et humoristique l’univers de ces femmes aux moeurs légères. Ceci, avec un don de soi qui est à l’image des légendes qu’elle semble réincarner sur scène.

Du 10 au 13 avril
À Tangente

À surveiller
La danseuse de flamenco Rosanne Dion est en spectacle le vendredi 18 avril. Elle nous présentera Pasion Espanola: une soirée qui, tout comme le printemps, saura raviver les ardeurs. Sept musiciens, chanteurs et danseurs se partageront la scène dans le but de nous communiquer leur passion du métier. À voir…

Bouge de là
Le dimanche 30 mars, j’ai emmené mon fiston de deux ans voir le spectacle de danse jeune public Comme les 5 doigts de la main, de la compagnie Bouge de là, dirigée par la chorégraphe Hélène Langevin. La représentation était à 14 h. Normalement, c’est son heure de sieste. Mais le dynamisme inventif de cette pièce a su le tenir en éveil… et par le fait même réveiller l’enfant qui ronflait bruyamment en moi.

Pour une fois, on n’infantilise pas le mouvement pour le présenter aux jeunes, comme s’ils n’étaient pas capables d’apprécier. Au contraire, Hélène Langevin pousse encore plus loin, mais du côté de la fantaisie. Chose qui manque d’ailleurs souvent dans nombre de spectacles de danse s’adressant à un public adulte, et qui saurait sans contredit les rendre plus intéressants et innovateurs. Voici une danse sans prétention qui sait être à la fois touchante, divertissante et pédagogique.

Si j’avais vu un spectacle comme celui-là étant gamin, j’aurais emmerdé mon père pour qu’il m’inscrive à des cours de danse jusqu’à ce qu’il cède, malgré les nombreuses réticences que les préjugés défavorables propres \à sa génération lui imposaient. Cet engouement, je le dois en partie à la performance d’un Manuel Roque drôle, théâtral, athlétique, techniquement juste et sensible. On ne le dira jamais assez: il y a trop peu d’hommes en danse contemporaine. Ce manque de représentativité est un facteur de découragement pour bien des garçons qui semblent encore croire qu’il s’agit d’un univers strictement féminin. Un cercle vicieux dont ce genre de spectacle peut nous permettre de sortir.