Claire Piché : Le goût de l'eau
Scène

Claire Piché : Le goût de l’eau

L’ambiophoniste CLAIRE PICHÉ a recueilli des échantillonnages sonores du Mexique à Charlevoix pour nourrir les tableaux d’Allégorie d’O. Un spectacle inspiré par la raréfaction d’une ressource vitale: l’eau…

Il y a quatre ans de cela, Claire Piché était assise au bord de l’océan Pacifique, sous le soleil couchant de Playa Matapalo (Costa Rica), écoutant les lourdes vagues venues s’échouer au bout d’un long périple ondulatoire. C’était comme une entrevue avec la nature. Le géant bleu lui a alors dit: "Je ne suis pas éternel." C’est donc en voyage à l’étranger que cette ambiophoniste a pris conscience de la situation alarmante entourant la diminution progressive de nos réserves d’eau: "Il est bouleversant de constater qu’à certains endroits sur notre planète, des villages complets n’ont pas suffisamment d’eau pour survivre. Alors qu’ici, on s’arrose les uns les autres avec insouciance… Je crois que nous ne sommes pas encore suffisamment conscientisés."

Après le Costa Rica, l’artiste sonore s’est déplacée du côté de Puerto Vallarta (Mexique), puis s’en est allée sur une rive de la rivière Windigo (Ferme-Neuve) et sur le bord d’un ruisseau à Saint-Irénée (dans Charlevoix). Ensuite, elle s’est dirigée vers les montagnes d’ardoise de Kingsbury, faire couler cette eau sèche qui s’effritait entre ses doigts. Elle y a également enregistré le bruit de ses pas sur la glace, ainsi que les craquements d’un grand feu de camp. Pour finalement revenir à Montréal, écouter le chant des cigales annonçant la sécheresse.

C’est à partir de ces échantillonnages sonores que la créatrice montréalaise a élaboré son spectacle Allégorie d’O qu’elle nous présentera à Tangente, du 8 au 11 mai. Mais aussi avec l’aide de ses nombreux collaborateurs, qu’elle considère comme ses égaux: "J’aime que les artistes avec qui je travaille partagent avec moi leur vision artistique singulière, que ce soit les interprètes, le scénographe ou l’éclairagiste… Cela est grandement enrichissant pour une oeuvre."

Afin que chacun puisse créer sa partie, Claire Piché a monté des tableaux sonores à l’intérieur desquels elle a placé les interprètes. Ceci, en tenant compte des limites corporelles de ceux-ci. "Il n’y a rien qui me dérange plus que de voir, dans une comédie musicale par exemple, un faux vieux qui nous donne l’illusion d’avoir de la misère à marcher, et qui se met tout à coup à danser comme un jeune premier…" La recherche d’authenticité a donc été partie prenante du processus de création qu’ont vécu ensemble les danseurs Élodie St-Onge, Maxime Piché, Chantal Lamirande et Nathalie Lamarche, ainsi que le scénographe Robert Casavant, l’éclairagiste Martin Lamarche et le programmateur Nathanael Lecoudé, en compagnie de la conceptrice.

Ceux qui fréquentent régulièrement Tangente ont pu voir Claire Piché à l’oeuvre lorsqu’elle accompagnait Chantal Lamirande sur scène, en mars dernier. Allégorie d’O se veut, de la même manière, une recherche artistique qui sait faire place à une part d’improvisation et de renouvellement. "De cette façon, la pièce n’est jamais figée et on trouve chaque soir quelque chose de nouveau qui nous surprend et nous amène ailleurs." Nous aurons donc droit à un spectacle à l’image de sa conceptrice: une oeuvre ouverte.

À surveiller
On peut ne pas aimer les pièces – parfois un peu longues – de Louise Bédard. Mais il est impossible – je crois – de ne pas aimer la voir danser. Car elle possède ce je ne sais quoi qui fait que chacun de ses mouvements est un délice. Elle est présente sur scène comme peu savent l’être. On la regarde et on se dit tout bas: "Que c’est agréable de danser!" La voilà qui nous revient avec sa toute nouvelle création, La Femme ovale, qu’elle présentera au Studio de l’Agora de la danse, du 9 au 17 mai. Il s’agit d’un solo interprété par cette créatrice que l’on sait être une femme à l’écoute de ses pulsions.

Sur le terrain
Les 26 et 27 avril dernier, l’Usine C rendait possible la tenue d’un stage de hip-hop dirigé par Tayeb Benamara, l’un des danseurs de la troupe Hush Hush Hush de Belgique, de passage à ce moment-là. Afin de prendre le pouls de ce style de plus en plus populaire dans notre métropole, j’ai suivi les deux jours d’ateliers qui étaient proposés. Cela m’a permis de découvrir un fin pédagogue en la personne de Tayeb, qui a rapidement su créer une atmosphère conviviale autour de l’apprentissage d’une technique difficile à maîtriser. Il fut aussi intéressant de constater à quel point la culture hip-hop s’est développée de manière extraordinaire à l’extérieur de son continent d’origine. Ce genre d’initiative judicieuse est donc tout à l’avantage de ses organisateurs et des participants qui ont su s’ouvrir à l’altérité. À quand le prochain!?